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Le travail sur carapace de tortue: Un métier qui aura disparu dans sept ans

C’est une activité qui appartiendra bientôt au passé. L’artisanat sur écaille de tortues épuise ses derniers stocks avant une fin programmée dans sept ans. Yves Riou, l’un des quatre derniers professionnels de l’île travaillant cette matière, raconte comment la profession s’est retrouvée dans une telle impasse. Gérant de Version Ecaille, il est spécialisé dans la […]

Ecrit par L.Grondin - C. Corenthy – le vendredi 25 octobre 2013 à 18H14

C’est une activité qui appartiendra bientôt au passé. L’artisanat sur écaille de tortues épuise ses derniers stocks avant une fin programmée dans sept ans. Yves Riou, l’un des quatre derniers professionnels de l’île travaillant cette matière, raconte comment la profession s’est retrouvée dans une telle impasse.

Gérant de Version Ecaille, il est spécialisé dans la bijouterie de l’écaille. Colliers, boucles d’oreilles utilisant de l’écaille ventrale, dorsale, du bois d’ébène et l’argent demeurent ces matériaux de prédilection.

Artisan écailliste depuis plus de 30 ans, Yves Riou fait partie de cette promotion d’apprentis ayant bénéficié des cours dispensés à l’époque par le Centre d’Ecailles de Saint-Leu, qui n’est aujourd’hui qu’un lointain souvenir.

« Une quarantaine de jeunes ont été formés », se souvient-t-il. Yves Riou faisait partie de la bande. Il s’agissait d’une école décentralisée de la fameuse école Boulle de Paris. Une référence.

Le premier signe d’une activité plus vraiment dans l’air du temps arrive en 1984. Le moratoire sur le travail des tortues est engagé. L’ensemble des stocks encore utilisés à l’heure actuelle remontent à cette date. En 1998, l’ensemble du stock réunionnais est inventorié pour alimenter les tenants d’un arrêté ministériel régissant une activité dont l’horizon se bouche.

Entre-temps, l’annonce de fermeture programmée de la ferme Corail est formalisée. Nous sommes en 1994. Les portes de la ferme seront définitivement fermées trois ans plus tard.

 

Ce stock de carapaces est détenu en lieux sûrs par les quatre derniers artisans travaillant l’écaille de la tortue verte dans l’île. « Elles sont conservées dans des containers à hydrométrie régulière », révèle Yves Riou, seul moyen pour prolonger sa qualité d’origine. « Aujourd’hui, nous estimons qu’il nous reste un stock de carapaces pour environ 7 ans d’activité ». Loin d’être abattu sur l’inévitable disparition de tout un pan de spécialisation de l’artisanat local, Yves Riou ajuste une réalité qui s’impose à lui comme à ses confrères. « Nous ne sommes pas très loin de la retraite, on a tous entre 20 et 30 ans d’activité, donc une fois le stock épuisé, nous irons en retraite », avise-t-il.

« Un produit qu’il faut venir chercher à la Réunion »

Son émotion est beaucoup plus vive lorsqu’il retrace les heures de gloire de cette niche mais néanmoins vitrine de l’artisanat local. « C’était une activité très importante dans les années 90. Une dizaine d’entreprises employaient environ une cinquantaine de personnes. Et dans les métiers d’art, c’est quand même assez rare », entonne l’intéressé.

Une fois le stock de carapaces épuisé, la profession se fait à l’idée qu’aucune alternative n’est possible, quelle que soit le sens de la transaction. « Importer des carapaces : c’est impossible pour nous ». Le schéma est identique pour les pays étrangers pour qui l’exportation est très difficile. Tout l’arsenal répressif autour des saisies douanières rend tout commerce à grande échelle inenvisageable. La conscience environnementale a fait légitimement son oeuvre.

« On peut dire qu’on est quasiment les derniers au monde à travailler l’écaille », estime Yves Riou. Pour parer à toute tentation d’exploitation des tortues marines dont la fameuse tortue verte bien ancrée dans l’océan Indien, celles qui viennent à mourir dans les murs de Kélonia, par exemple, sont destinées à la destruction. Direction l’équarrissage.

L’activité, elle, retient son souffle. Le temps est compté. « Nous n’exportons pas énormément. L’écaille est un produit qu’il faut venir chercher à la Réunion donc c’est un atout pour la Réunion que de permettre aux touristes de découvrir un métier d’art qui a complètement disparu ailleurs. »

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Yves Riou dispense des démonstrations à Kélonia quelques jours dans la semaine. Se rapprocher de Kélonia.

 

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