Le 13 août dernier, s’est tenu le conseil d’administration de l’Association des ports des îles de l’océan Indien, aux Seychelles. Théophane Narayanin, trésorier de la CCIR, et Cyrille Rickmounie, président de la commission Port, ont fait le déplacement pour évoquer les enjeux économiques et stratégiques du Port Réunion dans la zone océan Indien. Pour rappel, la CCIR est détentrice de la concession du port de commerce de la Réunion jusqu’au 31 décembre 2012, mais cette date pourrait être repoussée en raison des demandes faites par la collectivité à l’Etat. Ce matin, au siège de la Chambre de commerce, il s’agissait de présenter la synthèse des points abordés lors de ce conseil d’administration, à savoir les forces et faiblesses des ports de la zone, le développement de la croisière dans la zone, la lutte contre la piraterie et les investissements réalisés dans les prochaines années.
« Aujourd’hui le port de commerce de la Réunion est le troisième port de la zone océan Indien en terme de dimension de quai et du nombre de rotations de navires. En tant que seul port européen de la zone, nous sommes dans une situation délicate par rapport à la concurrence de Maurice. En terme de facturation il y a des efforts considérables à faire à la Réunion« , explique Théophane Narayanin. Pour seul exemple, le coût de transbordement d’un conteneur passe de 65 euros à Maurice à 110 euros à la Réunion. Le port de commerce de la Réunion peut néanmoins se targuer d’avoir une situation financière bonne. « Le port a gagné de l’argent l’année dernière, environ 4 millions d’euros, il bénéficie d’une bonne et saine gestion« , précise Cyrille Rickmounie.
Des investissements de 100 millions d’euros
Pour devenir plus compétitif et accueillir plus de bateaux, le port va investir environ 100 millions d’euros qui passeront dans l’extension du quai de conteneur de 510 à 650 mètres minimum, l’augmentation du tirant d’eau de 12,5 à 14 mètres et l’acquisition de deux portiques supplémentaires. « Aujourd’hui le port de la Réunion est le 3ème port français. L’objectif est de devenir plus compétitif dans la zone« , explique Jean-Marc Nourby, directeur général des services de la CCIR. Mais en face, Maurice a décidé d’investir également à hauteur de 200 millions d’euros en doublant sa capacité d’accueil et en proposant un tirant d’eau plus important. « Maurice déroute beaucoup de bateaux et fait beaucoup de transbordement en raison des prix« , précise Théophane Narayanin.
Il reste à la Chambre de commerce quelques mois en tant que délégataire de la concession du port de commerce de la Réunion, ce dernier devant repasser dans le giron de l’Etat au 31 décembre, même si la CCIR fait tout pour repousser cette échéance. « Aujourd’hui, le port est sous concession de la CCIR. On ne peut pas dépouiller la Chambre de commerce de tous ses actifs en très peu de temps (ndlr : La CCIR a perdu la concession de l’aéroport). Il y a un risque de déstabiliser l’outil consulaire. Aujourd’hui, des cabinets d’expertise travaillent sur cette question et doivent faire un rendu auprès de l’Etat au cas où le port passerait en port maritime. On se bat et on ne recule devant rien. L’Etat n’a pas vocation à gérer des ports. Il y a une véritable crainte de voir le port devenir privé, ce qui serait un problème pour le consommateur« , souligne Théophane Narayanin.
L’impact financier de la piraterie
Autre point abordé, la croisière dans la zone océan indien qui connait de grosses difficultés depuis les problèmes de Costa Croisière (ndlr: naufrage du Costa Concordia en Méditerranée). Les îles de l’océan Indien disposent de « potentiels très attractifs« , explique la Chambre de commerce, comme le climat, les durées raisonnables de traversées entre les différents ports et le classement au patrimoine mondial des Cirques, Pitons et remparts de la Réunion. Une délégation de l’Association des ports des îles de l’océan Indien doit se rendre en novembre à Marseille, au salon de la croisière, pour promouvoir la possibilité d’accueil des navires dans les ports de la zone. « Reste un problème, la piraterie au large des côtes somaliennes‘ », explique Théophane Narayanin.
L’impact de la piraterie reste important sur l’économie de la zone océan Indien. « Le coût est de l’ordre de 30% supplémentaire sur le fret. (…) Pis, des compagnies refusent de venir dans la zone et ce sont notamment Mayotte et les Seychelles qui en paient un lourd tribut. Aujourd’hui, certains bateaux doivent être escortés par des commandos, par exemple la Sapmer (ndlr: entreprise de pêche de l’île de La Réunion)« , souligne-t-il. Même si le nombre de navires déroutés entre 2009 et 2011 est passé de 52 à 29, les dispositifs de dissuasion et de protection sont onéreux à mettre en place.
La prochaine assemblée générale de l’APIOI doit se tenir à la Réunion en mars 2013. En attendant, d’autres ports de la zone océan Indien devraient rejoindre l’association, notamment le port des Maldives et celui du Sri Lanka.