Vanille semi-fraîche, vanille gourmande, vanille verte, il existe de nombreuses dénominations pour caractériser la vanille lorsqu’elle n’est pas tout-à-fait prête à la consommation. Car avant de commercialiser un produit fini, les producteurs de vanille doivent procéder à un long processus de préparation des gousses qui peut durer jusqu’à deux ans après la récolte de celles-ci. Il s’agit notamment d’échauder les gousses avant de procéder à une lente et longue opération de séchage au cours de laquelle les gousses perdent en humidité et développent tous leurs arômes.
Oui mais tout ce processus a un coût pour les producteurs. Depuis quelques temps, certains d’entre-eux commercialisent donc de la vanille encore verte. Apparemment, il y aurait un véritable marché pour ce type de produit, notamment auprès des touristes qui ont parfois de bien mauvaises surprises en rentrant chez eux. « C’est une catastrophe pour l’image de la vanille. Les touristes achètent ce type de vanille mais quand ils arrivent chez eux, elle est moisie », explique Bertrand Come, le responsable de la Vanilleraie à Saint-Suzanne.
Selon lui, on ne peut d’ailleurs pas appeler cela de la vanille car ces gousses ne respecteraient pas les normes Afnor, qui définissent des critères précis pour caractériser la vanille, qu’il s’agisse du taux d’humidité ou du taux de vanilline. Pour Bertrand Come, la vanille fraîche ne respecte aucun de ces deux critères caractéristiques de la vanille noire. « Elle est interdite à la vente (…) C’est un peu comme si un producteur de pruneau d’Agen vendait des prunes fraîches », lance-t-il.
Certains touristes pensent découvrir « la vraie vanille »
Pourtant, force est de constater que le marché existe. Certains touristes sont d’ailleurs persuadés d’acheter une vanille de qualité supérieure. En effet, la vanille verte, encore humide, est beaucoup plus charnue que la vanille noire. En arrivant à la Réunion, les profanes de la gousse pensent donc découvrir la vraie vanille, d’autant que l’arôme des gousses est déjà présent à ce stade.
Harry Leichnig fait partie de ces producteurs qui commercialisent des gousses de vanille qu’il qualifie de semi-fraîche. De son point de vue, les gousses qu’il commercialise ne moisissent pas car le produit est stabilisé. Le producteur explique qu’il ne vend pas ses gousses immédiatement après la récolte et l’échaudage mais après environ six mois de séchage. Selon lui, certains clients réunionnais auraient pris l’habitude d’acheter sa vanille et de poursuivre l’affinage eux-même. « Mes clients sont contents et reviennent. C’est l’essentiel pour moi », explique le producteur de Saint-Philippe pour qui les normes Afnor existent seulement pour la vanille destinée à l’exportation.
Cette pratique permettrait de faire baisser les prix au kilo puisque la vanille semi-fraîche se négocie moins chère qu’un produit fini. Il faut environ quatre kilos de vanille verte pour obtenir un kilo de produit fini.
Quoi qu’il en soit, le sujet fait débat entre les producteurs. A la coopérative de Bras-Panon, la position sur ce dossier semble plus nuancée. D’un côté, Jimmy Péribe, le directeur de la coopérative, estime qu’on doit protéger l’image de la vanille de la Réunion et les modes de préparation traditionnels et d’un autre, il laisse la porte-ouverte à d’éventuelles innovations pour de nouveaux marchés. Bref, le sujet est complexe, on en reparlera…