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La lettre que la CFTC va remettre à Michel Sapin

Alors qu'une table ronde va avoir lieu cet après-midi, à 16h, entre le ministre du Travail, Michel Sapin, et les partenaires sociaux, la CFTC va profiter de l'occasion pour remettre une lettre au membre du gouvernement. Nous la publions ci-dessous en intégralité:

Ecrit par zinfos974 – le jeudi 14 novembre 2013 à 14H39
« Monsieur le Ministre,
 
Tout d’abord nous vous remercions pour cette rencontre où il sera question du dialogue social comme levier de développement territorial. 
 
De quel dialogue social parlons-nous ?  Du dialogue on en parle, du social on en parle. Dans une île hors norme,  en terme de chômage et de pauvreté, les politiques se suivent et se ressemblent depuis des décennies et les changements promis hier pour maintenant se font toujours attendre. 
 
Depuis prés de 20 ans les organisations syndicales tentent par le dialogue social responsable de faire appliquer sur notre territoire les conventions collectives nationales. 20 ans plus tard aucune avancée sur ce chantier. 
 
En 2009 les organisations syndicales mènent combat pour le pouvoir d’achat. Dans l’ensemble des outre-mer, des milliers de travailleurs descendent dans la rue. La tension est forte et le risque d’explosion sociale imminent. 
 
Face au risque d’une explosion sociale l’Etat  en quelques jours accepte les propositions des syndicats  qui obtiennent le bonus Cospar.
 
Quand la contestation par la violence est plus efficace que le dialogue social pour faire avancer les dossiers, nous faisons courir un risque majeur à notre territoire. 
 
Dans une île où la première richesse est la paix sociale, tous les gouvernements par leur manque d’inspiration, leur indécision, leur inaction mettent inconsciemment en péril cette richesse première.
 
Cette paix sociale sans laquelle rien n’est possible est d’autant plus menacée que ce gouvernement fort avec les faibles mais faible avec les forts, encourage partout la malhonnêteté et la ruse  et exacerbe la violence.  
 
Un gouvernement faible avec les forts et fort avec les faibles, qui  n’a jamais vraiment pris à cœur de combattre la fraude et l’évasion fiscale. Tous les ans, la France est privée de 60 milliards  d’euros volatilisés dans des paradis fiscaux entretenus par les multinationales pour milliardaires à la soif d’or insatiable. Dans le même temps le gouvernement assomme  les petites entreprises  et la classe moyenne qui ne peuvent bénéficier de l’optimisation fiscale. La dernière recette du gouvernement est de supprimer dans le prochain budget l’avantage offert à ceux qui paient les études de leurs enfants et qui subissent déjà par ailleurs la rigueur salariale. 
 
Un gouvernement faible avec les forts et fort avec les faibles par l’esprit de démission qui l’habite, débloque pour Marseille et sa région 3 milliards d’euros. Le signal fort est bien reçu dans le milieu des professionnels de la kalachnikov  qui voient leur région mieux considérée que celle des adeptes de la non-violence à qui le gouvernement propose dialogue social vide de sens et de contenu.
 
Un gouvernement faible avec les forts mais toujours fort avec les faibles, plus réceptif aux arguments explosifs de nos frères Corses  où l’état abonde largement en faveur de la continuité territoriale, oubliant les Réunionnais beaucoup plus éloigné, mais  loin des yeux , loin du cœur.
 
Un gouvernement faible avec les forts mais toujours fort avec les faibles qui en quelques heures apporte la solution au bonnets rouges exaspérés sous le fardeau fiscal de plus en plus lourd et sans moyen significatif pour un vrai plan de lutte contre la pauvreté. 
 
Comment parler dialogue social dans un tel contexte ? Comment préserver la paix sociale quand l’esprit de démission du gouvernement face aux plus forts, laisse se développer les circuits parallèles sinueux dans le seul but de profiter des failles fiscales du système,  quand la ruse, la malhonnêteté et la violence s’avèrent être les seuls arguments recevables et que les mauvaises causes  finissent par triompher au détriment des justes causes ?
 
Par la fraude fiscale permanente, les systèmes sociaux s’effondrent entraînant dans leur chute la paix sociale.  
Quel dialogue social est encore possible quand la finalité du gouvernement se résume à une approche comptable de la nation, sans vision politique, la seule politique se résumant à l’exploitation des classes moyennes ? 
 
Et pourtant les outre-mer en général et la Réunion en particulier contribuent fortement au rayonnement mondial de la France.
L’histoire nous enseigne que dans des moments essentiels  pour la France, les Outre-mer ont toujours été au rendez-vous du combat des droits de l’homme, parfois même contre une certaine France qui oubliait son message universel face au nazisme triomphant. La géographie nous apprend  que sans l’Outre-mer, la France ne serait pas la deuxième nation maritime au monde : 11 millions de kilomètres carrés, quasiment à égalité avec les Etats-Unis. Grâce à l’outre-mer, la France  peut s’enorgueillir de posséder une biodiversité avec laquelle aucun autre pays au monde ne peut rivaliser ainsi qu’une très grande diversité biologique, d’un très haut niveau d’endémisme de la faune et de la flore, d’un patrimoine biologique d’une importance exceptionnelle et mondialement reconnu.  
L’économie nous apprend que les Outre-mer c’est aussi un marché supplémentaire pour les grandes entreprises françaises (qui interviennent dans les secteurs de l’énergie, de la télécommunication et  téléphonie, de la finance et des assurances, de la grande distribution,  du BTP…), qui commercialisent leur production,  leurs services et bénéficient des grands chantiers de la commande publique et ainsi recueillent la quasi-totalité  des richesses produites sur le territoire. 
 
En définitive  la Réunion réclame à la France  la contrepartie indispensable au maintien des grands équilibres macro économiques et de la paix sociale. D’ailleurs si les échanges réciproques avec les outre-mer se faisaient au détriment du territoire national,  jamais l’Etat ne se serait engagé à faire de la collectivité départementale de  Mayotte le 101ème département  depuis mars 2009. 
Pour la France, nous sommes dans un jeu macro-économique à somme nulle, car l’argent qui est diffusée dans l’économie des outre-mer, n’est que le carburant pour faire tourner cette économie qui dés lors qu’elle est dynamique et revitalisée retourne au centuple à la source.
 
Dans les faits, les échanges entre la Réunion  et la Métropole  ne se résument pas à ses aspects marchands, mais bien au-delà du déficit de notre balance commerciale c’est  le rayonnement de la France qui serait crépusculaire. En effet au delà de ces aspects importants, reste un aspect fondamental non seulement pour la Métropole mais pour le monde entier : la capacité de l’Outre-Mer de pouvoir conjuguer simultanément modernité et coexistence pacifique de toutes les races et de toutes les religions, sans que se pose le problème du choc des civilisations.
Cette capacité fondamentale de faire cohabiter une église à coté d’une mosquée elle même proche d’un temps hindou et d’une pagode révèle une force de cohésion sociale existante nulle part ailleurs.
Cette capacité de Réunion constitue la référence mondiale d’unir sur une même terre les valeurs universelles de chaque peuple, de chaque race, de chaque pays.
Pour ne pas l’avoir encore compris, la planète reste confrontée à des dépenses astronomiques pour tenter de contenir la guerre ou encore de maintenir la paix. Mais l’absence de guerre n’est pas toujours la paix  et les sommes considérables investies ne suffisent toujours pas pour neutraliser cette logique mortifère planétaire.
 
Ce modèle  est une chance pour la France pour l’Europe et pour le monde demain.
Faute de cette compréhension fondamentale, la Réunion devra t-elle, pour susciter une prise de conscience politique,  recourir à la violence pour bénéficier d’un traitement équitable compte tenu de sa situation hors norme ? La Réunion devra t-elle suivre la voie des bonnets rouges ou se professionnaliser dans l’art du maniement de la kalachnikov ? Certains ici l’ont compris en paralysant l’île avec quelques camions pour appuyer leurs revendications, bloquant toute activité économique tout le temps des négociations. Par ce moyen de pression qui s’apparente aux pratiques mafieuses, ils finissent par faire plier le représentant de l’état et les politiques.
 
Loin de vouloir un traitement de faveur pour obtenir encore plus de subventions, il s’agit de réaliser en dehors des clichés parisiens,  la nécessité  du maintien des grands équilibres. 
 
 
Le changement que nous attendons tous, c’est d’abord de considérer qu’il n’est pas de vraies richesses  sans les hommes. Mais il est à craindre que les conséquences sociales des excès politiques en faveur des plus forts et au détriment des classes moyennes qui s’appauvrissent de jour en jour accélèrent la dégradation globale d’une société obnubilée par le pouvoir de l’argent et l’amour du pouvoir face à une classe politique impuissante.  
Et pourtant c’est dans un tel contexte d’abus et d’inégalités  engendrant la concentration des richesses par  la prospérité du capital et des profits industriels et fonciers au détriment des revenus du travail dans les années 1840-1850 que se développent les premiers mouvements communistes et socialistes censés rétablir les  grands équilibres indispensables au bon fonctionnement des grandes démocraties. 
C’est certainement dans une telle époque de confusion où disparaissent toutes les valeurs  fondatrices des grandes civilisations  que De Gaulle disait : « Je n’aime pas les communistes car ils ne sont pas communistes, je n’aime pas les socialistes car ils ne sont pas socialistes et je n’aime pas les miens car ils aiment trop l’argent ».
 
La suite de l’histoire et de ses excès nous la connaissons, nous la vivons tous, tous les jours !
 
Vous remerciant pour tout l’intérêt que vous accorderez au présent courrier,
 
Nous vous prions, Monsieur le Ministre,  de bien vouloir agréer l’expression de nos respectueuses salutations. »

 

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