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« L’affaire Philippe P. »: banale, navrante… emblématique hélas !

Tribunal correctionnel de Saint-Pierre, 25 septembre 2014.

Ecrit par Jules Bénard – le jeudi 25 septembre 2014 à 14H20
Le cas de Philippe P. n’est pas isolé. Il est même courant ; il y en a des centaines comme ça en correctionnelle chaque année. Pourquoi alors ai-je choisi d’en parler ? Parce que cette affaire semble tristement résumer la solitude violente dans laquelle semblent errer nombre de nos jeunes qui mériteraient mieux que le choix entre voler… ou mourir de faim.
 
Il n’en est pas à sa première condamnation. Comparaissant menotté entre deux gendarmes, à 28 ans, il se targue d’un CV judiciaire fort de 17 condamnations (!). Dont 4 ans fermes en 2013 pour vol à main armée. Autant dire qu’il a échappé de peu aux Assises. A son âge, il cumule déjà de nombreuses années de taule et attend, de surcroît, d’être jugé pour d’autres affaires en cours d’instruction.
 
Comme tous les casseurs légers de l’occiput, il s’est fait prendre par faiblesse de jugement. Et sans doute un sentiment d’impunité malgré ses longs passages devant les tribunaux…
 
Enquêtant sur un vol de moto aux Avirons, les gendarmes s’intéressent à notre front bas. Et découvrent chez lui les restes d’une voiture dérobée peu auparavant au Tampon. Vol avec destruction, recel de vol, il est cuit et, en vieux routier des tribunaux, ne nie rien.
 
D’ailleurs, il n’a même pas d’avocat : pour quoi faire ?
 
Le procureur est navré de constater qu’une personne a érigé le vol aggravé en mode de vie : « Son casier judiciaire témoigne de son choix d’existence. Malgré les nombreux avertissements de la justice, il persévère ».
 
En prison, il travaille aux cuisines et a une petite rémunération. En foi de quoi la présidente Peinaud lui a tendu la perche : « L’accusation a réclamé 3000 euros d’amende. Etes-vous disposé à payer ? »
 
Réponse pathétique : « La pas tout de suite pou moin sortir ! »
 
Philippe P. a été condamné à 6 mois fermes, plus 3000 euros de dommages-intérêts aux victimes de ses larcins.
 
Il n’y avait personne pour le défendre ; il n’a même pas sollicité une défense d’office à laquelle il avait pourtant droit. Inconscience ? Désintérêt ? Lassitude ?
 
La présidente Peinaud, avec insistance, lui a encore tendu la bouée de sauvetage après l’énoncé de la sentence (je traduis de mémoire) : « Vous avez un petit salaire pour votre travail aux cuisines de la prison. Vous pouvez vous acquitter de votre dette, même 10 euros par mois ».
 
L’homme n’a rien dit. Il s’est laissé re-menotter par ses gardiens et est reparti comme il était venu. Avec ses années de prison en attente et son absence d’espoir pour seul viatique.
 
Son cas n’est pas hors-normes, je le sais. Je ne cherche pas plus à l’excuser. Je me dis simplement qu’il y a des centaines de jeunes comme lui, ici… et que l’un d’eux pourrait être mon fils.
 
Mais pourquoi mon fils serait-il comme ça ?
 
Parce que la société est mauvaise ?
 
Ou parce que j’aurais failli à mon devoir de papa ?

 

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