« Je ne suis pas l’homme de l’échec », assure Patrick Floc’h. L’homme de 55 ans, apporteur de l’opération et assistant maître d’ouvrage sur ce projet d’hôtel de luxe, installé sur le site très prisé du Cap Méchant, a assigné en février 2016 devant le tribunal de grande instance de Saint-Pierre la SCI Le Superbe pour non-paiement. L’actualité du projet se joue ces derniers temps davantage sur le terrain judiciaire que sur le chantier, au ralenti. [Le Superbe, hôtel 5 étoiles sur 8 hectares aurait dû ouvrir ses portes cette année.]urlblank:http://www.zinfos974.com/Saint-Philippe-espere-beaucoup-de-l-hotel-de-luxe-Le-Superbe–un-phare-touristique_a102723.html
Pourtant, au lancement du projet en 2012, sur une idée de Patrick Floc’h, insiste-t-il, tous les feux semblaient au vert. Ce dernier, à la recherche d’investisseurs à l’époque, rencontre Patrick Jiang sur les conseils d’un ami. Patrick Jiang est à ce moment-là gérant de l’enseigne Ideka et C’ Idéal aujourd’hui en liquidation judiciaire . « Ça aurait pu être lui ou bien un autre, je ne lui ai pas mis une Kalachnikov devant lui. Il était au courant des risques ». Patrick Floc’h, lui, ignore à ce moment là l’interdiction de gérer qui pèse sur Patrick Jiang. Il ne l’apprendra que bien plus tard, par les médias.
« J’étais l’homme génial de la situation »
Après un rendez-vous positif avec la mairie de Saint-Philippe, une délégation – composée d’Olivier Rivière, de son directeur de cabinet, de deux autres personnes de la mairie mais aussi du premier notaire sur l’affaire, Me Thazard, Patrick Jiang et de Patrick Floc’h – se rend en Chine afin de rencontrer les investisseurs. « Jusque-là tout se passait très bien. J’étais l’homme génial de la situation ».
La situation va d’ailleurs commencer à se dégrader progressivement à partir d’avril 2015, selon Patrick Floc’h. Les travaux n’avançaient pas. Il y a eu, certes, des erreurs de parcours, reconnaît l’assistant de maître d’ouvrage : dans la réalisation du permis de construire obtenu en bonne et due forme en 2014, lors des échanges avec la DEAL concernant l’aménagement du site naturel, « les plans ont également été modifiés des dizaines de fois, sans compter les devis avec les entreprises », indique Patrick Floc’h.
Patrick Jiang , qui n’est ni le gérant de la SCI Le Superbe puisque officiellement entre les mains de Yang Shen sa compagne, ni celui de la SAS Le Superbe dirigée par sa sœur Sylvie Jiang, interviendrait dans « les moindres étapes du projet, du choix des matériaux aux consultation des entreprises ».
Le projet s’éloigne peu à peu du projet initial dessiné par Emmanuel Coste, le cabinet d’architectes, maître d’œuvre de conception. « Ils n’arrêtent pas de modifier les plans pour des raisons de coût. Nous sommes loin du projet éco-durable et caméléon dans un site remarquable et très touristique, pensé à l’origine. Mon idée était d’apporter un plus et de développer le sud en matière d’hôtellerie. Jiang a signé pour le projet initial mais n’a pas cessé ensuite d’y vouloir apporter des modifications notamment pour le bâtiment collectif en forme de virgule ».
Le PNF s’interroge
Décembre 2015, l’assistant de maître d’ouvrage est définitivement écarté du projet. « Par courrier, on me demande de ne plus assister aux réunions ». Il sera remplacé par Yves Boudet. Quelques mois plus tard, c’est au tour de l’Agence Coste architectures d’être évincée. Cette dernière porte l’affaire devant le tribunal de grande instance de Versailles. Le maître d’ouvrage remercie ses premiers collaborateurs « sans les payer », assure Patrick Floc’h.
La presse écrite se fait alors l’écho des plaintes déposées pour escroquerie en bande organisée d’une quinzaine d’investisseurs chinois, en septembre 2017, qui pour certains ont engagé entre 300 et 400 000 euros. Trois mois auparavant, des auditions ont été menées par les gendarmes de la section de recherches de Saint-Denis puis le dossier transmis au parquet national financier de Paris (PNF). La justice s’interrogeant sur un montage à 30 millions d’euros dont les dessous ont été révélés par le Journal de l’île.
Patrick Floc’h a, lui, été entendu pas moins de 5 heures en tant que témoin. Aujourd’hui, malgré le contentieux qu’il l’oppose à la SCI Le Superbe, il dit souhaiter que le projet se réalise et surtout ne demande qu’une chose. « Je veux que mon argent, que mon travail soit payé. Je suis droit dans mes bottes ». Entre sa mission d’apporteur d’affaires et d’assistant de maître d’ouvrage, la somme de 181 000 euros resterait à payer à Patrick Floc’h. La décision du tribunal n’est pas attendue avant plusieurs mois.