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Handicap: Charles Gardou explique son concept de « société inclusive »

Invité du colloque sur l'accessibilité universelle organisé par l'Apajh Réunion (Association Pour Adultes et Jeunes Handicapés), Charles Gardou consacre depuis de nombreuses années ses recherches et travaux aux situations de handicaps. Nous avons profité de son déplacement à la Réunion pour interroger ce professeur des universités.

Ecrit par MR – le mercredi 05 février 2014 à 16H14

Zinfos974: Pourquoi parlez-vous de « société inclusive » ?
 
Charles Gardou: Le terme, « société inclusive » présent dans l’intitulé de mon ouvrage est utilisé en opposition à la « société exclusive« , qui maintient des exclusivités. Certains ont des droits, d’autres en sont privés.

L’idée de mon ouvrage « La société inclusive, parlons-en ! » est d’interroger la vie de la cité, de montrer que l’on s’est habitué à des formes d’exclusivité.
 
Est-ce que la notion de « norme » porte préjudice aux personnes touchées par un handicap ?
 
Toutes les sociétés ont des normes culturellement construites. J’explique dans un chapitre de mon livre que « l’exclusivité de la norme, c’est personne ; la diversité c’est tout le monde »

Sur ce point, les pays nordiques sont véritablement plus avancés que nous. Ils savent déconstruire les normes. Pour exemple, un enfant pas dans la norme, ne justifie pas qu’il ne doit pas avoir accès à l’éducation.

En France, nous faisons face à une normativité excessive des institutions.
 
Votre réflexion n’est-elle pas légèrement utopique ?

Je ne crois pas. L’idée des sociétés est de fixer des horizons. Nous tendons vers un mieux, nous devons chercher à progresser. L’égalité est une utopie mais elle est une ligne d’horizon qui nous permet d’avancer. Il faut faire de la cité un chez soi pour tous.
 
Sur 7 milliards de personnes dans le monde, environ 1 milliard sont touchées par un handicap. Pourquoi c’est un sujet qui semble susciter si peu d’intérêt au sein de la population ?

Un tiers de l’humanité est concerné. Ce n’est pas une question marginale mais centrale. Je pense que c’est le traitement que nous avons choisi d’en faire qui pose problème, c’est un traitement à part.

On ne met pas le handicap dans l’universel des hommes. On crée en fait deux humanités, où la plus petite a bien du mal à interagir avec la plus grande, sous-entendu la plus nombreuse.
 
L’accessibilité universelle, thématique de ce colloque, est la condition d’une société inclusive. Que se cache derrière ce terme « accessibilité » ?

L’accessibilité ce n’est pas que l’aménagement. Cette vision est bien trop réductrice. On parle aussi de l’accès aux soins, à l’éducation, au sport, à la culture, à la sexualité…

L’accessibilité universelle permet à chacun, peu importe ses capacités, d’utiliser l’ensemble des dispositifs et services offerts par la société de façon similaire. Partout, la société doit s’adapter à ses citoyens et non l’inverse.

On a créé des privations de patrimoine commun. Or, on est tous héritiers de ce patrimoine quand on nait. Notre propre récit va enrichir ce patrimoine qu’on laissera ensuite à nos enfants. Donc nul n’a l’exclusivité de ce patrimoine humain et social.

Vous pensez que l’on raisonne mal ?

Nous avons tendance à déconsidérer des vies et à sur fragiliser les gens fragiles. Parfois même, les actions que nous menons à destination des personnes en situation de handicap tendent finalement à conforter ces notions d’exclusivité. A titre d’exemple, pourquoi réduire l’art à l’art thérapie pour les personnes en situation de handicap ? Ces personnes n’ont-elles pas simplement le droit de s’exprimer, de se libérer à travers l’art ?

Je pense que nous sommes dans un tournant de notre récit de la pensée humaine.

 

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