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Guy Dupont à propos de GERRI : « Je n’ai pas de raisons de baisser les bras »

Début 2012, où en est le projet GERRI* ? Un projet qui fera, si le calendrier est tenu, de la Réunion une île autonome énergétiquement à l'horizon 2030. Guy Dupont, sa tête pensante depuis avril 2011, nous répond avec réalisme sur l'avancée des projets les plus emblématiques de l'houlomotricité jusqu'à celui d’énergie thermique des mers (ETM) qui est tombé à l'eau, pour filer vers les Antilles. Entretien.

Ecrit par zinfos974 – le vendredi 10 février 2012 à 11H39

Guy Dupont, la Réunion est-elle encore loin de son autonomie énergétique ?
Il y a deux lectures possibles. Si nous nous tablons sur une version très large de GERRI où la Réunion serait arrivée à la pointe, on a encore un très très long chemin. A côté de ça, oui, on a des projets qui sont dans les tuyaux et qui avancent bien. Mais pour que la Réunion soit entièrement autonome en 2030, beaucoup d’eau passera encore sous les ponts, c’est le cas de le dire !

Quelles sont donc les dernières actualités ?
Nous avons organisé le 9 décembre dernier un colloque sur les énergies marines. Il s’agissait de faire état de ce qui se passe sur le sujet et de juger des expériences diverses qui peuvent se faire ailleurs dans le monde. Eh bien on a pu se rendre compte qu’on était pas les plus mauvais. Parfois on est même au-dessus des autres, mais ça ne suffit pas. Concernant l’utilisation de la houle, je pense aux exemples de l’Ecosse et du Portugal où sous cette forme novatrice de stockage d’énergie, nous ne sommes pas si mal à la Réunion.

Quels projets majeurs sont les plus à même d’aboutir rapidement ?
Trois dossiers sont avancés. Je peux citer le projet SWAC à Saint-Denis. Il fera intervenir un système de climatisation utilisant de l’eau de mer. Concrètement, des tuyaux de 1,5m de diamètre situés jusqu’à 1.500m de profondeur iront pomper de l’eau à 4 ou 5° qui, envoyés dans un échangeur thermique iront rafraîchir des grands bâtiments comme l’aéroport, les hôpitaux, etc… bref les grandes structures. Grâce à ce système on économise énormément d’énergie : c’est moins 40 Mégawatts annuels d’économie sans compter le fait que cette source d’énergie pourrait aboutir sur d’autres utilisations puisque cette eau des profondeurs est très chargée en nutriments. Je pense notamment aux projets dans le domaine des algues.

Dans le Sud, le projet PELAMIS doit voir étendre au large de Saint-Pierre des sortes de gros boudins flotteurs de 3 à 4m de large et jusqu’à 100m de long. La pression de la houle entre les différentes articulations de la structure créera de l’énergie qui pourra même être stockée. Nous y attendons 30 Mw d’économie.

Le troisième projet s’appelle CETO. On est dans le même schéma avec l’utilisation de l’énergie marine des vagues. Les bouées disposées sur les fonds marins sont mises en mouvement par l’énergie de la houle et transmet son mouvement à une pompe qui met un fluide sous pression. Le fluide sous pression est transporté à terre où une turbine couplée à un alternateur transforme l’énergie en électricité. A terme, c’est 30 Mégawatts de production qui repart sur le réseau EDF qui est attendue.

Des trois projets, c’est donc en tout environ une centaine de Mégawatts gagnée en économie d’énergie.

Pour que les gens aient un ordre d’idée, les Réunionnais consomment pour combien de mégawatts à l’année ?
Environ 450 Mw. On serait donc à un petit quart de la consommation annuelle à la Réunion.  

Le deuxième projet (PELAMIS) propose même un stockage alors que l’on sait que c’est par exemple le gros défaut du photovoltaïque. Comment cela est-il rendu possible ?
Grâce à un système à base d’air comprimé dont l’énergie est récupérée quand on en a besoin, donc même lorsqu’il fait nuit.

 

Les gens attendent de savoir si ces projets seront opérationnels à un horizon de 5, 10, 15 ans ?
Ce sont des projets expérimentaux, et de grande ampleur. Cela aurait été beaucoup plus facile si l’on avait eu des procédés qui avaient déjà fait leurs preuves ailleurs. Là on expérimente. Côté financier, en tout ce sont des financements à hauteur de 150 à 200 millions d’euros qui sont en jeu. Ce n’est pas rien. Et nous sommes en France, vous l’aurez remarqué (sourires). Au minimum, c’est deux ans de procédures.

Je pense que 2012 sera consacrée en grande partie à la poursuite de la procédure administrative. Je pense notamment à des enquêtes comme la mise en conformité vis-à-vis de la loi « littoral » mais il n’y a pas que ça. L’année 2012 est donc celle du bouclage administratif et financier de ces projets. 2013 verra les gros travaux d’au moins deux de ces trois projets débuter. Tous devraient être opérationnels en 2014. Mais il y a à côté de cela d’autres initiatives dans le photovoltaïque, la biomasse, la géothermie…

Je repense à cette « loi littoral » qui peut être très contraignante. Ces fameux boudins au large de Saint-Pierre seront-ils visibles du front de mer ?
Oui, on verra dépasser le dessus seulement de ces flotteurs situés à une centaine de mètres du rivage.

Le projet d’énergie thermique des mers (ETM) a filé vers les Antilles. C’était un vrai coup d’arrêt ?
Il avait déjà filé avant que je n’arrive à ce poste mais le projet ETM en était encore au stade de la recherche fondamentale quasiment. En plus, il n’aurait délivré un rendement en mégawatts modeste, que 15 Mw, et pour un coût initial beaucoup plus important que les trois autres, soit entre 300 à 400 millions d’euros.

Les Réunionnais entendent parler du projet GERRI depuis des années mais qu’est-ce qui se cache derrière le projet GERRI, en moyens humains ?
Vous allez être étonné. Nous sommes trois ! Moi même en tant que président bénévole et deux autres collègues.

On vous a confié les rênes de GERRI en avril 2011, êtes-vous toujours enthousiaste ?
Je n’ai pas de raisons de baisser les bras. La Réunion m’a beaucoup apporté, il est normal que je sois à mon tour à son service. Je suis en retraite et je ne suis pas d’une nature contemplative.

*Green Energy Revolution Reunion Island

 

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