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Guerre inutile ou dialogue ?

Monsieur Gunet, je crois qu’il ne faut pas se tromper ni de guerre, ni d’époque, ni de desseins. La qualité de langue est reconnue par tous les linguistes de la Terre entière, aux créoles en général, au créole réunionnais en particulier. Il ne sert à rien de partir d’une définition du patois (terme qui n’existe […]

Ecrit par zinfos974 – le jeudi 22 mars 2012 à 15H11

Monsieur Gunet, je crois qu’il ne faut pas se tromper ni de guerre, ni d’époque, ni de desseins.

La qualité de langue est reconnue par tous les linguistes de la Terre entière, aux créoles en général, au créole réunionnais en particulier. Il ne sert à rien de partir d’une définition du patois (terme qui n’existe nulle part ailleurs qu’en France) pour essayer d’y fourrer notre créole.  Si les scientifiques avaient rangé les créoles dans les dialectes (terme qui, lui, a une signification non idéologique mais scientifique) j’en aurais été malheureux, mais je me serais plié. Les créoles  sont  mis par la science dans la grande famille  des langues humaines et j’en suis fier.
En prenant en compte les résultats des études des linguistes, l’Assemblée Nationale Française a classé, le 11 Mai 2000 (modification de la Loi sur l’Outre-Mer)  les créoles parlés sur tout le territoire de la République parmi les langues de France. Il vous faut accepter cela : vous ne pouvez vous mettre au dessus de la science, au dessus des lois !

Pour continuer à parler de politique, sur un plan personnel maintenant :  je n’ai jamais nié mon passé dans ce domaine. Jamais !  Mais lorsque j’ai compris que je n’y étais pas compétent, j’ai pris les distances que ma conscience m’imposait. Mais c’est là une très vieille histoire. Elle date de 1975 (la majorité des Réunionnais vivants aujourd’hui n’étaient même pas nés !) Je tiens aussi  à vous préciser que je n’ai pu signer la Convention de Morne rouge : je n’ai jamais mis les pieds en Martinique ! Je tiens aussi à signaler que j’admire tous ceux qui s’impliquent, de façon honnête (il y en a), ouverte, tolérante, sincère (il y en a aussi) en politique, et que je suis reconnaissant à toutes les femmes et hommes politiques qui ont pris fait et cause pour notre langue régionale, son enseignement, sa valorisation, quelle que soit leur obédience ! Dès que j’ai l’occasion de le dire, je le dis. J’en ai fait la démonstration le 6 octobre de l’année dernière, et vous étiez là !

Le fait de parler créole de nos jours à la télévision — langue que j’ai utilisée spontanément sur Antenne Réunion, dimanche soir —  n’est preuve de rien sur le plan de la politique statutaire, ou partisane, ou politicienne.  Dans mon cas, c’est tout simplement l’indication que j’ai du plaisir à m’exprimer en créole réunionnais, ma langue première, et à m’adresser à mes compatriotes réunionnais dans notre langue spécifiquement réunionnaise – ce qui n’est pas toujours possible. Il m’arrive souvent, très souvent, aussi souvent  que nécessaire, aussi souvent que cela me fait plaisir, de parler français. Cela prouve-t-il que je rejette notre créole ?
Pour ma part, je n’ai nullement l’intention de vous attaquer sur le fait que vous, vous vous soyez exprimé en français. Le français est l’un de nos biens, j’aimerais dire « communs » ! (Hélas, malgré ce que vous pensez, ce n’est pas vraiment partagé à La Réunion. Et notre devoir est de faire en sorte qu’il soit partagé). De plus votre « Grand lexique créole de l’île de la Réunion » (dont je conseille à tous la lecture) prouve que vous possédez bien notre créole.

Enfin – et je vous prie de bien faire attention à cela, qui pourrait mettre en cause l’honneur de personnes physiques et morales – l’argent que différentes institutions ont bien voulu attribuer à l’Office de la Langue Créole de La Réunion sous forme de subventions, a été utilisé à des fins déclarées à l’avance, avec la plus grande honnêteté, dans la plus grande transparence – toutes les pièces justificatives sont à la disposition des donneurs. D’autre part, le fait de dire (ce que vous avez fait dimanche) que,  dans l’école publique, l’enseignement du et par le créole est une « arnaque » est une accusation particulièrement grave : il n’y a de la part du rectorat de La Réunion, ou de ses responsables, ni vol, ni détournement de fonds, ni tromperie. Il y a simplement respect des textes valables pour toutes les langues régionales. J’ose espérer que ce terme « d’arnaque » a dépassé votre pensée.
Maintenant, tout cela étant dit, c’est à vous de voir si, à vos yeux, les anathèmes ont toujours cours, ou si un dialogue peut s’instaurer entre nous, dans le respect des différences et pour le bien  des Réunionnais.

Axel Gauvin

 

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