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Gabriel Martin: Une erreur médicale étouffée qui pourrait changer le visage de l’Hôpital public

L’hôpital Gabriel Martin est le théâtre d’une affaire dont l’issue pourrait rejaillir sur l’ensemble des hôpitaux publics de France. En suivant, comme le prévoit la procédure, la voie hiérarchique à la suite d’une erreur médicale intervenue dans son service chirurgical en 2002, le docteur Hubert Lhote ne pouvait présager de l’incroyable cabale qui allait se […]

Ecrit par zinfos974 – le jeudi 20 novembre 2014 à 06H51

L’hôpital Gabriel Martin est le théâtre d’une affaire dont l’issue pourrait rejaillir sur l’ensemble des hôpitaux publics de France. En suivant, comme le prévoit la procédure, la voie hiérarchique à la suite d’une erreur médicale intervenue dans son service chirurgical en 2002, le docteur Hubert Lhote ne pouvait présager de l’incroyable cabale qui allait se liguer contre lui.

Le 7 janvier 2002, en revenant de congés, le Docteur Hubert Lhote, spécialiste de chirurgie viscérale, apprend le contexte du décès d’une femme de 49 ans hospitalisée dans l’Unité Fonctionnelle de chirurgie viscérale du CHGM dont il est le responsable.

Le chirurgien de la patiente (le Dr S.), ainsi que le personnel du bloc opératoire, avaient oublié un morceau de textile médical de 50 cm sur 50 cm dans l’abdomen de la patiente.

Comme le veut la procédure, le Dr Hubert Lhote se voit dans l’obligation de produire un rapport retraçant les dysfonctionnements apparus dans son service et ayant amené à la mort de cet usager. Son rapport sera rédigé le 22 mars 2002 et attesté de réception le 26 mars 2002 par son chef de service (le Dr V.), unique destinataire du rapport. La précision est d’importance.

« Le dossier médical de la patiente a été nettoyé »

Au lieu de déclencher une série de procédures en interne pour tenter de comprendre l’enchaînement de cette erreur lourde de conséquence pour une famille, le docteur « alerteur » comprendra plus tard que son rapport ne fera pas l’objet d’une enquête interne. Ce rapport sera tout simplement « nettoyé » des éléments gênants.

 

Outre les enquêtes officielles de la DRASS et du ministère de tutelle, le témoignage d’un personnel assermenté du service où a eu lieu le décès de l’usager est accablant pour le directeur du CHGM. Ce témoignage, transmis au Parquet, vient attester d’une falsification du dossier médical de l’usager décédé.

Selon ce secrétaire médical, le directeur du CHGM lui a ordonné le 29 août 2002 de saisir un second compte rendu opératoire, soit six mois après le décès de cet usager, totalement différent du premier. Ce témoignage capital n’est venu que plus tard, en mai 2013, ce que le secrétaire médical explique par « la crainte pour ma carrière », en ajoutant que « j’ai dû garder au fond de moi cette histoire ».

Dans cette même volonté de tirer au plus vite un trait sur cette affaire embarrassante pour l’institution, la direction du CHGM négocie la démission du chirurgien de la patiente décédée. Une démission qui s’est réglée à l’amiable comme a pu le retracer le rapport de la DRASS en 2004.

Cette autorité avait été sollicitée en octobre 2003 par le maire de Saint-Paul, qui préside par ailleurs le conseil d’administration du CHGM, sur demande du Dr Lhote, lequel s’étonne que les droits des usagers n’ont pas été respectés.

Quant à Christian Abonnel, directeur de l’hôpital Gabriel Martin à l’époque, il sera muté en catimini dans le réseau de la coopération étrangère, au Burkina Faso, pour mieux se faire oublier.

S’en suit pour le docteur Lhote une série de décisions prises par le CHGM pour le déstabiliser. La direction du CHGM procède au retrait du tableau de liste de gardes de Gabriel Martin du Dr Lhote en cautionnant le refus des anesthésistes d’endormir les patients du docteur. Il est ensuite placé en congé maladie sans le moindre motif médical, un fait étonnant que relèvera la DRASS dans ses conclusions d’enquête du 18 février 2004. « Après mon placement en congé maladie, j’ai perçu mon traitement sans pouvoir travailler ». Il perd ensuite l’ensemble de ses droits (travail, traitement, congés), ce qui l’amène à déposer plainte contre X pour harcèlement moral.
 

 

Le docteur « non solidaire du corps médical » sera maintenu pendant cinq années hors de tout cadre légal dans un établissement hospitalier de l’Est de l’île, alors qu’interdiction lui était faite d’opérer à…Saint-Paul. Une bizarrerie parfaitement tracée dans les conclusions d’enquêtes de la DRASS et de l’Inspection générale des affaires sociales (l’IGAS), à son tour diligentée par le ministère de la Santé.

L’ARS Océan Indien est venue confirmer le 15 novembre 2011 que ce placement en congé ne correspondait à « aucun motif médical », ce que l’employeur est pourtant dans l’obligation de justifier.

« Comment a-t-on pu aboutir à la tentative de destruction d’un médecin plutôt qu’à la vérification de la bonne transmission des informations de ce dernier ? », s’étonne encore aujourd’hui le chirurgien. « Quel pouvoir occulte et malsain en son sein a pu conduire le Centre Hospitalier Gabriel Martin à s’opposer violemment au ministère de la Santé ? », retient ce dernier.

Le 18 septembre 2011, le Parquet finit par demander le renvoi devant le tribunal correctionnel de la personne morale du CHGM pour « harcèlement moral » qui fait suite à la plainte contre X du Dr Lhote.

[Le 6 décembre 2013]urlblank:http://www.zinfos974.com/Pour-avoir-denonce-une-bavure-medicale-le-chirurgien-devient-un-pestifere_a63824.html , le CHGM est condamné à une amende de 50.000 euros. Le principal est ailleurs. Le tribunal correctionnel confirme que le Docteur Lhote a été harcelé « pour le seul et unique fait d’avoir tracé dans l’intérêt des malades, des dysfonctionnements dans les suites du décès d’un usager ». L’autorité judiciaire faisait bon de rappeler que ces dysfonctionnements avaient été validés par pas moins de deux missions de la DRASS et de l’IGAS. Trois jours plus tard, le CHGM fera tout de même appel de ce jugement.

Les derniers développements

Le 23 octobre 2014 devant la Cour d’appel, l’avocat général, dans son réquisitoire, confirme en audience publique qu' »une affaire liée à la mort d’un usager de l’hôpital a été cachée ». « Malheur à celui qui dit la vérité « , ajoutera-t-il laconiquement, avant de demander la…relaxe du Centre Hospitalier Gabriel Martin du simple fait que l’on ne peut condamner une personne morale. Un précédent juridictionnel au niveau national prouve le contraire ! L’affaire a été mise en délibéré à ce 20 novembre 2014.

Pour le Dr Lhote et son avocat, Me Djalil Gangate, si cette décision venait à être confirmée, c’est la validation pure et simple d’un mode opératoire pour étouffer de telles erreurs médicales qui sera offerte aux 1.600 directeurs d’établissements hospitaliers de France. « La jurisprudence fera que la force de la loi autorisera n’importe quel hôpital public à se comporter comme le CHGM« , met en garde le Dr Lhote qui n’a cessé, durant ces dix ans de procédure, de prouver qu’en alertant des dysfonctionnements par le canal naturel de sa hiérarchie de service, il n’y a trouvé qu’un blocage incompréhensible, si ce n’est sous l’interprétation des réseaux d’influence.
 

 

« Les directeurs des hôpitaux publics français, représentants de ces personnes morales que sont les hôpitaux, auront ou non les mains libres (selon ce que décideront les juges de la Cour d’appel). Les médecins hospitaliers qui doivent en toutes circonstances répondre à leurs obligations sont en danger », avise-t-il.

La cour d’appel s’apprête à signer un blanc-seing à tous les directeurs d’hôpitaux publics

Cette affaire est sur le point de créer une première nationale. Si malgré de multiples enquêtes administratives et sanitaires qui débouchent aux mêmes conclusions de volonté de faire courir le délai de prescription suite à mort d’homme, l’avocat général ne retient que celle de la personne morale du CHGM, quelle valeur accorder à la loi HPST (hôpital, patients, santé, territoire) qui en son article 10 confirme que le chef d’établissement représentant la personne morale est au final le seul responsable devant la loi ?

Sans paraître, le délibéré de ce 20 novembre 2014 peut marquer un tournant dans le monde hospitalier public et représenter un grave précédent national pour ce qui est du devoir d’un médecin d’alerter en cas de besoin et dans un second temps, représente une menace pour les ayants droits de l’usager décédé.

Que reste-t-il du droit à la vérité pour la famille de la patiente ?

« il est inacceptable qu’un établissement hospitalier en entier se retrouve dans cette situation alors que dès le début des faits, le chef de service de chirurgie a été informé de faits graves », explique le Dr Lhote. Lequel chef de service a été reconnu, dès la première mission d’enquête de la DRASS en 2004, d’abus de pouvoir contre le Docteur Lhote.

Les juges sont dans une position délicate suite au réquisitoire de l’avocat général concluant à la relaxe alors que le jugement du tribunal correctionnel de 2013 confirme que les dysfonctionnements tracés par le chirurgien Lhote ont été validés par deux missions d’enquête précédentes de la DRASS et de l’IGAS.

Pour ce qui concerne l’information des proches de la patiente décédée, les faits sont donc désormais prescrits, sans qu’aucune certitude ne vienne étayer le fait que les ayants-droits de la patiente n’aient été alertés des ratés de l’acte chirurgical, du seul fait de l’intérêt d’occulter ce fait par la direction du CHGM.

 

Le témoignage édifiant d’un secrétaire médical qui, sur ordre, a dû effacer la première version du compte-rendu opératoire de la patiente décédée :

 

Gabriel Martin: Une erreur médicale étouffée qui pourrait changer le visage de l'Hôpital public

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