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Et si l’on remplaçait requins bouledogues par huitres ?

Ma vision de la Crise Requin de La Réunion illustrée par l’exemple : C’est l’histoire d’un type qui mange des huîtres sur une plage de Madagascar et qui décède quelques heures après son repas. Aucune autopsie n’est pratiquée pour s’assurer de la cause réelle du décès (souffrait-il d’intolérance ou avait-il une autre maladie, les huîtres […]

Ecrit par Yann de Prince – le jeudi 23 février 2017 à 06H25

Ma vision de la Crise Requin de La Réunion illustrée par l’exemple :

C’est l’histoire d’un type qui mange des huîtres sur une plage de Madagascar et qui décède quelques heures après son repas.
Aucune autopsie n’est pratiquée pour s’assurer de la cause réelle du décès (souffrait-il d’intolérance ou avait-il une autre maladie, les huîtres étaient-elles fraîches, avait-il mangé autre chose ? etc. … ) mais cela n’empêche pas un Préfet brestois qui a eu vent de l’accident survenu à Madagascar où il n’a jamais mis les pieds, vivement encouragé en cela par des écologistes très actifs, de décider que, au motif du sacro-saint principe de précaution, il faudra désormais interdire toute commercialisation des huîtres en France.
Il promulgue donc aussitôt un arrêté en ce sens.

Dès lors, la filière économique ostréicole se meurt et, faute d’être ramassées, les huîtres se mettent à proliférer à tel point qu’elles envahissent lentement mais sûrement et progressivement le littoral Atlantique puis dégagent des toxines rendant la baignade et les activités nautiques très dangereuses pour l’homme dans les zones où elles sont les plus concentrées. Les baigneurs et les pratiquants d’activité nautiques sont invités à la prudence…

Suite à des décès inexpliqués survenus lors de baignades en mer, le successeur de notre brave Préfet est sommé par la population de régler le problème. Certains le menacent d’engager sa responsabilité. Tout un ensemble de personnes soutiennent que les baigneurs décédés ont commis des imprudences et qu’il n’existe aucun lien démontré avec la prolifération des huîtres. Selon eux, les victimes se seraient baignées trop tard le soir ou bien encore après une grande marée…, tandis que les ostréiculteurs et les habitués des activités nautiques soutiennent que ce sont des toxines dégagées par les huîtres qui prolifèrent hors de tout contrôle qui sont responsables des décès.

De vifs débats, stériles et sans fins, ont lieu. Des gens meurent à nouveau…

Sous la pression des écologistes appuyés par des scientifiques qui affirment tous en chœur que les huîtres sont dans leur milieu naturel et qu’il faut les préserver plutôt que les « détruire aveuglement » pour permettre aux têtes blondes bretonnes de se baigner, le Préfet décide d’interdire totalement la baignade en mer sur l’ensemble du littoral Atlantique sous peine de recevoir une contravention. Ce faisant, il répond à la menace qui lui était faite et pense dégager l’Etat de sa responsabilité. Des panneaux d’interdiction sont disposés partout et chaque touriste étranger qui se rend en France est averti du danger et de l’interdiction de baignade dans l’avion au moment d’atterrir.

Des scientifiques sont mandatés à grands frais par l’Etat pour conduire des études sur les raisons pour lesquelles ces satanées huîtres se seraient mises à produire des toxines de manière inexpliquée. Des sondes sont positionnées, des caméras sous-marines disposées ici et là et des résultats promis au plus tôt dans 3 ans. Des huîtres dégageant d’importantes quantités de toxines mortelles sont prélevées mais tout de même remises dans leur milieu naturel pour permettre le bon déroulement de l’étude. Il est vrai qu’une étude sérieuse, c’est long et ça se doit d’être rigoureux ; tant pis si des vies humaines sont en jeu, la rigueur scientifique et le droit à la vie des huîtres sauvages priment et justifient bien de tels sacrifices humains, d’autant qu’il ne s’agit que d’inconscients plaisanciers.

L’opinion publique est prise à partie : « Aimez-vous la nature ? » – « Etes-vous pour la destruction massive des huîtres pour le simple plaisir égoïste des baigneurs ? » leur demande-t-on. « Bien sûr que oui j’aime la nature et bien entendu je suis opposé à toute destruction massive et aveugle » répondent-ils spontanément de toute bonne foi à la question pernicieuse qui leur est posée. Il n’a bien entendu jamais été question de destruction massive mais simplement de gestion, de régulation et de protection des vies humaines.

Malheureusement, quelques passionnés enfreignent tout de même la consigne et décèdent. Ils sont montrés du doigt, traités d’irresponsables et leurs familles sont vilipendées. Un touriste tombe accidentellement de son embarcation dans la mer et décède sous l’effet des toxines. Les écologistes et les scientifiques préconisent d’étendre l’interdiction de baignade pour proscrire toute navigation plaisancière en Bretagne, ce qui est aussitôt décidé.

A aucun moment, jamais (!), aucun représentant de l’Etat n’envisage d’évaluer ou de remettre en cause la décision de départ (vous connaissez l’effet papillon ?) qui a conduit un jour un Préfet à décréter arbitrairement l’interdiction de toute commercialisation d’huître en France suite au décès d’un consommateur à Madagascar ! Jamais l’Etat n’envisage que la situation ne posait pas de problème particulier avant et qu’il serait bon d’y revenir. Les élus locaux font profil bas, la cause écologiste étant populaire, ils ne veulent surtout pas se mettre à dos cette part de leur électorat.

Pendant ce temps, d’autres pays continuent de cultiver les huîtres sans encombre et sans connaître de problème similaire à celui de la France. Les gens se baignent normalement dans la mer en Espagne, au Portugal et ailleurs.

Et la situation dure ainsi des années, s’accentuant et s’aggravant au point de devenir quasi-irrémédiable et sans qu’aucune mesure corrective ne soit prise si ce n’est la mise en place de bassins artificiels sur les côtés Atlantiques françaises pour que les gens puissent se tremper occasionnellement.

Surprise ! Un beau matin, une coquille d’huître canadienne est retrouvée sur une plage bretonne et les scientifiques en déduisent que certaines huîtres pourraient migrer sur de longues distances, si bien que le problème serait bien plus vaste et complexe qu’attendu.
Saperlipopette ! Qui l’eut cru ?

Selon eux, il va falloir leur allouer davantage de moyens et proroger les délais d’études initialement envisagés tout en maintenant les interdictions en cours.

Toute la filière économique ostréicole française est décimée, toute baignade dans l’océan Atlantique est formellement interdite en France et des gens continuent de mourir après s’être baignés.

Bien sûr, il s’agit là d’une pure fiction et connaissant nos amis bretons, nous pouvons être certains que si de telles décisions avaient été prises par un Préfet, les choses ne se seraient pas du tout passées comme cela en métropole.

Comment expliquer alors un pareil « traitement de faveur » pour La Réunion ? Je ne saurais pas vraiment le dire mais force est de constater encore une fois que La Réunion n’est pas logée à la même enseigne que la métropole.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, il suffit de remplacer huîtres par requins (bouledogue ou tigre), Bretagne par La Réunion, Atlantique par Océan Indien et filière ostréicole par petits pêcheurs réunionnais dans cette folle fiction pour comprendre la gravité et mesurer l’absurdité de la succession de décisions inconséquentes prises par l’Etat français depuis des années à La Réunion avec toutes les drames que cela continue d’engendrer.

Jean-Paul Virapoullé s’est exprimé publiquement hier et c’est encourageant. Je lui en suis personnellement très reconnaissant. Mais où sont les autres responsables politiques réunionnais ? Que comptent-ils faire ? Jusqu’à quand cette situation va-t-elle durer ?
Malheureusement, un requin est autrement plus mobile et plus dangereux qu’une huître et la résolution du problème de la prolifération des requins à La Réunion sera désormais bien plus difficile à régler que ne le serait celui des huîtres dans mon exemple. La faute à l’immobilisme, au manque de courage et au déni de réalité de l’Etat (toutes majorités confondues) dont la population réunionnaise est victime depuis des années maintenant. Parce qu’ils y ont été invités, des requins féroces ont élu domicile sur nos côtés. Ils marquent leur territoire en tuant les humains qui s’y aventurent. Le mal est devenu très profond.

C’est un euphémisme de dire qu’il est plus qu’urgent de traiter ce problème sérieusement en le prenant à bras le corps et à la racine. Des mesures ont été faites et jamais la toxicité de la chair des requins bouledogue et tigre n’a pu être démontrée mais le principe de précaution demeure et les pêcheurs réunionnais ont toujours l’interdiction de vendre du requin tandis qu’on en mange régulièrement aux Seychelles et ailleurs.

Et s’il c’était s’agit d’un thon ? Quelqu’un peut-il sérieusement croire ou soutenir que la commercialisation de thon aurait été interdite arbitrairement de manière généralisée et définitive en France sur la base d’un seul accident survenu à Madagascar, au demeurant sans que les causes réelles n’aient été analysées ?

Bien sûr que non !!

Quelle douloureuse question que celle qui doit nous hanter tous. Combien de morts auraient pu être évitées ?

Je suis meurtri par ce nouveau drame qui frappe La Réunion et j’adresse mes pensées les plus chaleureuses et compatissantes à la famille d’Alexandre, aux autres victimes ainsi qu’à toutes les familles et aux amis des personnes victimes d’attaques de requins et j’implore les Autorités françaises pour qu’elles daignent enfin affronter les véritables problèmes avec honnêteté et en apportant enfin la preuve qu’elles sont désormais prêtes à assumer loyalement leurs responsabilités.

Yann de Prince

 

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