« Pour une relation apaisée de l’école avec la langue créole ». Cette phrase n’est autre le titre d’un communiqué de presse (voir ci-dessous) envoyé hier par la candidate écologiste sur la 2ème circonscription, Nila Minatchy, et Jean Erpeldinger, élu de Saint-Paul et membre du conseil d’administration du lycée hôtelier de Plateau Caillou. La deuxième casquette de Jean Erpeldinger est importante dans le sens où la question de fond posée sur la place de la langue créole à l’école part d’un incident survenu au lycée hôtelier.
Il faut d’abord savoir que le lycée hôtelier propose l’option LCR (Langue et culture régionale), option qui permet aux élèves qui le souhaitent de suivre des cours hebdomadaires sur le créole. Le succès de cette option n’est pas discutable, le lycée hôtelier est l’établissement qui compte le plus grand nombre d’inscrits en cours de langue créole sur toute l’île.
Un accueil froid par le chef d’établissement?
Les faits remontent à la semaine dernière. Une jeune femme en Master 2 intègre l’établissement pour donner des cours de créole aux élèves dans le cadre d’un stage en responsabilité (elle gère la classe de façon autonome). Très rapidement, elle confie à sa conseillère pédagogique et enseignante, Reine-Claude Vigne, qu’à son arrivée, elle aurait été très mal accueillie par le chef d’établissement qui, en présence de son adjoint, aurait critiqué son option et l’aurait mise en garde sur son avenir professionnel.
Elle annonce vouloir arrêter son stage au sein de cet établissement. « Dans le courant de la semaine, des représentants syndicaux du lycée vont la convaincre de poursuivre son stage, le Rectorat est informé. Tout est alors censé rentrer dans l’ordre« , témoigne Reine-Claude Vigne, enseignante en langue créole qui s’exprime ici au titre de déléguée syndicale au CALCR (Conseil Académique pour la Langue et la Culture Régionale à la Réunion), pour la FSU.
Vendredi dernier, jour de l’incident. La stagiaire récupère les élèves qui ont cours ce matin là, en présence de sa conseillère pédagogique et enseignante. A 11h15, précisera Reine-Claude Vigne, le chef d’établissement fait appeler cette dernière par une surveillante avec insistance.
« Moi je vais foutre à la porte de l’établissement votre stagiaire«
« Etes-vous au courant de la plainte de la stagiaire à mon encontre?« , questionne le proviseur. N’appréciant pas qu’elle se soit notamment plainte auprès du Rectorat, il aurait alors menacé l’enseignante de mettre à la porte de l’établissement la jeune femme. « Moi je vais foutre à la porte de l’établissement votre stagiaire« , aurait-il déclaré selon la déléguée syndicale à la FSU, qui poursuit, « il traverse le lycée et se rend vers la classe où la stagiaire est en train de donner cours« .
Dans le Quotidien du jour, l’intéressé réfute ces dires en affirmant que l’enseignante en langue créole, Reine-Claude Vigne, est « à fleur de peau », indique Michel Mongellaz au journaliste. Pour lui, sa relation avec Reine-Claude Vigne, « persuadée que je n’aime pas le créole », est à l’origine de ce contentieux.
La stagiaire a quoi qu’il en soit indiqué à son responsable de stage que le proviseur est entré, a stoppé le cours devant tous les élèves, et lui a demandé de ranger ses affaires et de le suivre dans son bureau. Ce dernier affirme que la stagiaire est alors partie sans vouloir la suivre dans son bureau, de son côté, cette dernière explique qu’elle a été mise à la porte.
L’affaire est en cours d’étude au Rectorat. Le SNES-FSU a demandé des excuses du chef d’établissement dénoncant la méthode, tandis qu’Europe Ecologie pose la question de fond de la place de l’enseignement du créole à l’école. Selon Jean Elperdinger, la tension est palpable au sein des conseils d’administration de l’établissement lorsque ce sujet est abordé, cet incident n’étant que la goutte d’eau qui a fait déborder le vase.
Voici le communiqué EELV qui, partant de cet incident, évoque la polémique existante autour de cet enseignement du créole.
« L’histoire difficile de l’Education Nationale avec la langue créole a, semble-t-il, connu un nouvel épisode. Selon le témoignage de professeurs du Lycée Hôtelier de Plateau-Caillou, une jeune enseignante stagiaire en langue et culture régionale aurait été interrompue et exclue de l’établissement alors qu’elle donnait un cours. Un incident qui interviendrait après des mois de relations difficiles et de controverses autour de cet enseignement.
Quel gâchis, au vu de tous les projets valorisant le travail des élèves lors de moments forts comme la semaine créole, « la fèt kaf » ou encore la journée Porte Ouverte chaque année (projets de classes à PAC, partenariat avec le musée de Villèle, artistes au lycée: Amba, Destin, Lansor, Christine Salem,Danyel Waro…); des évènement qui mettent en lumière le dynamisme de cette option.
Faut-il rappeler que le créole est la langue maternelle de 90% des élèves réunionnais ? Enseignants, nous-mêmes, nous constatons que son usage peut agir comme une libération chez certains élèves. Son enseignement, loin de les enfermer, leur permet de s’approprier leur culture. Les mettant en confiance, il facilite leur relation à l’autre.
Plus qu’ailleurs, dans un Lycée Hôtelier, son enseignement (qui reste facultatif) nous paraît pertinent. L’offre touristique de la Réunion, la mise en valeur de ses richesses et de sa diversité ne peuvent se construire qu’avec des Réunionnais à l’aise avec leur kosé, leur culture, leur imaginaire, leur patrimoine…
Aussi, en tant que candidate aux législatives, en tant qu’élu de Saint-Paul, soucieux, comme tout écologiste, de la promotion des langues régionales, nous plaidons pour que la langue créole trouve une place juste dans les établissements scolaires de la Réunion. Au Lycée Hôtelier, nous plaidons pour un apaisement et une sortie du conflit par le dialogue et le respect dans l’intérêt des élèves.
Nila Minatchy, Candidate écologiste sur la 2ème circonscription
Jean Erpeldinger, Elu de Saint-Paul, Membre du CA du Lycée Hôtelier de Plateau-Caillou »