C’est un véritable serpent de mer. Comme tous les ans, plusieurs dizaines de candidats réunionnais réussissent avec brio le concours d’enseignant. Malgré la disponibilité de postes dans l’île dans certaines filières, certains d’entre eux sont mutés en métropole, comme Maria*, Ophélie* et Flora*.
Les trois futures enseignantes en espagnol ont déjà reçu leur académie d’affectation : deux d’entre elles seront affectées à Versailles et la dernière à Créteil.
Maria a déjà alerté le recteur, les syndicats, les ministres de l’Éducation nationale et des Outre-Mer et même le Président de la République de sa situation. Certains comme François Hollande m’ont répondu, d’autres non… « Le recteur a déclaré que cela n’était pas de son ressort », regrette la jeune femme:
Flora, de son côté, a tout d’abord eu comme affectation l’académie de La Réunion. Elle s’est ensuite retrouvée sur liste d’attente, une personne ayant eu les fameux points CIMM (centre d’intérêts moraux et matériels) qu’elle n’avait pas eus auparavant. Ophélie, pour sa part, a eu pour académie d’accueil celle de Créteil, alors qu’elle ne l’avait pas demandée lors de ses voeux.
Les trois jeunes enseignantes se « posent des questions » sur leurs mutations respectives. « Bien sûr, nous savions que c’était un concours national et que nous avions des chances de partir. Mais quand on regarde bien notre cas pour la filière espagnol, on se rend compte qu’il y a énormément de postes disponibles à l’académie de La Réunion », clament les trois professeures-stagiaires.
Ces dernières s’estiment « lésées » par rapport aux professeurs contractuels, « qui bénéficieront des postes disponibles dans l’académie de La Réunion ». « Nous ne sommes pas contre les contractuels. Mais beaucoup d’entre eux qui ont passé le concours ont dans le même temps une situation familiale déjà établie et ont des points supplémentaires qui font qu’ils sont prioritaires par rapport à nous », poursuivent-elles.
« On se dit autant ne pas être lauréates du concours et postuler en tant que contractuels«
Une situation qui n’est « pas équitable » pour les trois professeures d’espagnol. « Nous avons eu notre concours et quand on regarde, il ne nous sert à rien : l’académie va préférer embaucher des contractuels pour faire des économies. On se dit autant ne pas être lauréates du concours et postuler en tant que contractuels », déplorent-elles amèrement. D’autant plus qu’elles ne sont pas abonnées aux dérives qui biaisent les procédures d’affectation (faux Pacs, fausse boîte aux lettres ou encore fausses factures) .
Un statut de professeur contractuel que préfèrent « de nombreux enseignants » afin d’échapper à la mutation en métropole ou dans d’autres territoires ultramarins affirment-elles. « Certains d’entre nous disent qu’ils préfèrent cette situation et ne faire valider que leur master tout en restant contractuel pour être sûrs de rester à La Réunion. Nous connaissons le cas d’une collègue qui s’est pacsée avant la date limite et qui passe devant nous avec plus de 1 200 points CIMM (Centre des intérêts moraux et matériels, CIMM, le barème prévoit pour les DOM une bonification de 1000 points pour les personnels justifiant d’intérêts pour le territoire demandé s’il est en vœu 1, ndlr). Le concours devrait nous donner une certaine priorité par rapport à eux. Si l’académie est déficitaire aujourd’hui, pourquoi employer des contractuels si le déficit n’est pas comblé avec des professeurs titulaires ? », s’interrogent-elles encore.
« Conscientes » que leur démarche risque de provoquer de nombreuses critiques, les trois jeunes femmes assurent « ne pas être fermées d’esprit » et ne sont « pas contre un départ ». « Nous sommes toutes les trois des enseignantes en langues étrangères et nous avons pris part à l’aventure Erasmus pour parfaire notre espagnol. Plus tard, nous aimerions participer à des programmes d’échanges. Mais lorsqu’on nous dit que l’académie est déficitaire en enseignants d’espagnol, on aimerait quand même qu’il y ait une certaine cohérence dans les propos et dans les actes. Le recteur, lui, on l’a fait revenir car c’est un Réunionnais », tiennent à rappeler Maria, Ophélie et Flora.
Ces dernières attendent beaucoup de la commission qui se tiendra le 31 mars prochain en présence du recteur et qui étudiera leurs cas. Elles se tiennent prêtes « à se concerter sur de futures actions » à mener si leur situation n’évolue pas favorablement. « En attendant, nous devons quand même remplir des voeux jusqu’au 29 mars pour notre académie d’affectation. Les réponses définitives seront connues le 12 juin prochain, mais des recours sont encore possibles jusqu’à fin août. Ce n’est vraiment pas l’idéal pour préparer la prochaine rentrée », terminent-elles, inquiètes du sort qui leur sera réservé.
*noms d’emprunt