Il y a un an, en mars 2012, Bernard Kerbidy, sa femme et ses cinq enfants, déménagent dans les hauts de Sainte-Suzanne. Le deal proposé par la propriétaire, son ancienne institutrice : « Nous avons passé un accord verbal. On ne payait pas de loyer pendant un an, elle nous fournissait le matériel et je reconstruisais la case« , explique Bernard.
L’affaire paraît plutôt bonne et la case en taule, bien que très délabrée, est assez grande. Trois chambres pour les marmailles, une pour les parents, deux pièces à vivre… « J’ai peut-être fait une erreur en acceptant mais je la pensais honnête. Je me suis dit, on va galerer pendant deux ou trois mois mais avec du matériel, la case serait vite vivable« , souligne Bernard.
« Même dans les années 50 on ne vivait pas comme ça ! »
Problème, le matériel ne vient pas et les relations entre propriétaire et locataires se dégradent, l’ancienne institutrice de Bernard vivant dans le même quartier, à Sainte-Suzanne les hauts. En avril, la fille de la propriétaire reprend les choses en mains. « Nous avons signé un bail de deux ans« , ajoute le quadragénaire, une durée qui n’est pas légale. Le loyer est fixé à 400 euros par mois. »Sans que nous n’ayons rien signé, la CAF a viré, à partir de mai 2012, 436,96 euros par mois au titre du loyer à la propriétaire« , assure-t–il.
En avril 2012, la fille de la propriétaire et Annie-Claude, la femme de Bernard, en viennent aux mains à leur domicile : « Elle a insulté mes marmailles et m’a foncé dessus« , s’émeut Annie-Claude. Bilan, un doigt cassé pour Annie-Claude et un jour d’ITT pour la fille de la propriétaire, d’après la famille Kerbidy.
Si le logement était salubre, l’histoire ne serait probablement jamais allée aussi loin. Mais sans matériel fourni, la famille Kerbidy vit dans un taudis. Pas d’électricité, pas d’eau potable, de nombreuses pièces sans fenêtre, des fuites dans chaque endroit… L’humidité est partout. « Même dans les années 50 on ne vivait pas comme ça ! Quand j’étais gamin, je vivais mieux ! Je suis triste de mettre mes enfants dans cette situation« , déplore Bernard.
Ce carreleur de profession, actuellement au chômage, a bricolé, raccordé des tuyaux à la rivière pour qu’il y ait un peu d’eau, et fait des raccordements électiques. « Dès qu’il ne pleut pas, on ne peut plus se laver, plus faire la vaisselle…« , déplore-t-il. La famille Kerbidy se baigne dehors, dans un grande bassine, la salle de bain n’étant pas salubre elle non plus.
La famille dort dans deux pièces. Trois filles dans une chambre, les parents et deux autres enfants dans une autre pièce… Avec des fuites, sans porte et sans fenêtre, évidemment ! « J’ai changé au moins trois fois de matelas pour mon fils tellement ils étaient humides« , assure le père.
En un an, l’état de santé des occupants s’est dégradé. Deux enfants font des crises d’asthme, Bernard ne peut plus travailler à cause « du stress et de la fatigue »… La famille a contacté l’association Roulpanou mais sans succès : « On a payé la cotisation mais ils ne nous ont jamais aidé« , regrette Annie-Claude, qui s’occupe de ses cinq marmailles âgés de 1 à 12 ans.
Une procédure de justice en cours
Au final, c’est l’association Momon Papa Lé la qui a orienté la famillle pour les démarches à suivre. Une procédure de justice est en cours afin de savoir si le logement est insalubre. « La question est de savoir si les époux Kerbidy habitent dans un endroit conforme à la loi. La propriétaire s’était engagée à exécuter les premiers travaux de nécessité mais jusqu’à ce jour rien n’a été fait« , explique Lucas Caliamou, l’avocat de la famille.
Maître Caliamou assure vouloir « déposer des écritures en demandant au juge de se déplacer sur les lieux« . L’affaire a été renvoyée au 18 mars. « Si le logement est déclaré insalubre, nous demanderons une solution de relogement immédiate« , ajoute l’avocat. Le loyer a été gelé.
Ce que le Bernad Kerbidy attend désormais, c’est « que la propriétaire nous rembourse l’argent que nous lui avons versé pendant un an, plus les frais que nous avons dépensé pour la justice et également un dédommagement pour le préjudice moral« . L’action de la famille Kerbidy invitera peut-être d’autres habitants de Sainte-Suzanne les hauts à déclencher des procédures. « Trois maisons de la même propriétaire, dont deux habitées, sont également insalubres », conclut Bernard.