Les statistiques sur le tourisme aux Antilles françaises montraient que ce secteur était insuffisamment exploité puisqu’il ne pèse que 4 à 5 points des PIB régionaux de Martinique et de Guadeloupe, contre 20 % à 50% pour les archipels anglophones voisins. En outre, les deux îles françaises, qui accueillent chacune environ 650.000 visiteurs par an, vivent essentiellement des touristes venant de métropole, quand le reste de la Caraïbe bénéficie d’une clientèle internationale.
Pour ce faire, les Antilles françaises se sont mobilisées en misant sur la culture :
En Martinique, les opérateurs privés sont en pointe avec la Fondation Clément, devenu le premier lieu d’exposition pour l’art moderne et contemporain sous la houlette de Bernard Hayot.
En Guadeloupe, le secteur public a pris les choses en main. Ainsi François Hollande inaugurera à Pointe-à-Pitre le 10 mai, jour de commémoration de l’abolition de l’esclavage, la préfiguration du Mémorial ACTe, équipement muséographique consacré à l’histoire de l’esclavage. Cet équipement sera aussi un élément majeur de rénovation du front de mer, comme l’a été le MuCem pour Marseille. Né de la volonté du conseil régional, ce lieu d’exposition, mais aussi de conférences, centre de recherche, et espace dédié à la création contemporaine, sera ouvert au public le 5 juillet. Il entend rayonner sur toute la Caraïbe et drainer les croisiéristes. Le musée a acquis 500 pièces dans le monde entier : témoignages, objets de la vie quotidienne, œuvres d’art…
Son budget s’élève à 68 millions d’euros (30 apportés par l’Etat, 13 la région, et 17 l’Europe).
Malgré des moyens limités (un budget de fonctionnement de 4,5 millions d’euros avec 35 personnes) le Mémorial ACTe entend tisser des liens avec des institutions phares du monde entier et mise sur 150.000 à 200.000 visiteurs par an.
Et chez nous à La Réunion , que faisons-nous ?
Le tourisme ne représente qu’une part infime de notre création de richesse. Bizarrement nous ne disposons pas des chiffres publics sur la valeur ajoutée créée par ce secteur et sa contribution à notre PIB. Nous savons simplement que la dépense totale des touristes ( qui n’est pas la VA nette ) est à peu près de 160 M€ /an soit 1 % de notre PIB
L’INSEE nous alerte aussi régulièrement sur la baisse continue de la fréquentation touristique . Orientée à plus de 80 % vers le marché métropolitain, le tourisme souffre c’est vrai de la crise économique qui perdure en France. La destination affronte également une crise liée aux attaques de requins, fortement relayées par les médias.
Mais ces arguments suffisent ils à justifier notre inertie .
Cette crise ébranle l’un des atouts majeurs de la destination Réunion et devrait donc nous mobiliser au delà de la simple remise en question du comité du tourisme .
Ceux qui pour des raisons politiciennes ont hier fait capoter notre Maison des Civilisations , – dont le coût et le budget de fonctionnement étaient à peu près équivalents à ceux du projet Guadeloupéen- , et pour certains lui ont préféré un aquaparc , une improbable Cité des Arts ou une médiathèque sans livres qui va enlaidir pour 100 ans la ville de Saint Paul devraient s’interroger sur la pertinence de leurs choix.
Pierre BALCON