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Axel Kichenin : « Privilégier les Ste-Mariens pour ne plus commettre mes erreurs passées »

Conseiller général dans les années 80 puis de 1998 à 2004, en passant par la mairie, Axel Kichenin a décidé de tenter à nouveau l'expérience des cantonales puisque son parcours politique semble lui offrir la victoire de façon "alternée". Ce médecin généraliste de profession veut retenir les leçons de l'échec de 2004. A l'époque, il avait été battu par Jean-Louis Lagourgue, homme fort municipal, départemental et régional de Sainte-Marie. Promis, et ce malgré l'accroc de 1998 où les socialistes ne lui avaient pas accordé leur confiance pour une alliance, Axel Kichenin compte sur l'effort commun des forces de progrès pour contrer le candidat choisit par Lagourgue, à moins que le maire de Sainte-Marie parte à la bataille lui-même. Entretien avec Axel Kichenin.

Ecrit par Ludovic Grondin – le jeudi 23 décembre 2010 à 07H52

Zinfos : Qu’est-ce qui motive votre envie de tenter les cantonales, après l’échec de 2004 ?
Axel Kichenin : « En fait l’Union Progressiste réunionnaise (UPR) a toujours rencontré, par les valeurs qu’il défend, de justice sociale, de respect et de tolérance culturelle, un grand degré de sympathie chez les réunionnais et notamment chez les sainte-mariens. Et plus d’une fois nous sommes sollicités par les gens pour que la sensibilité progressiste soit représentée. Il s’agit d’exprimer, à nouveau, ces valeurs que nous avons toujours défendues ».

Progressiste mais pas socialiste…
« A l’origine existait le Mouvement progressiste de gauche (MPG), pour bien signifier aux gens que nous étions bien de gauche. Nous avions créé ce mouvement en 1982 pour qu’il puisse se présenter aux municipales de 83 et nous l’avions emporté avec au second tour l’alliance PC et PS. Ce n’était pas évident car à l’époque la gauche était monopolisée par le Parti communiste réunionnais et un petit peu du Parti socialiste. Nous sommes donc passés de « Mouvement » à « Union » car nous avons fusionné avec le Mouvement des travailleurs réunionnais de Jean-Max Nativel ».

La diversification des candidats de gauche ne court pas à sa perte ?

« Je crois que c’est au contraire une bonne chose, le débat démocratique ne peut que s’enrichir de ces différentes sensibilités. Et cela permettra à l’électorat de se cristalliser sur ces différentes sensibilités pour ensuite s’élargir dans le cadre d’une union dans un éventuel second tour face à la droite qui considère Sainte-Marie comme un de ces bastions ».

Annoncer par avance une union des forces de progrès pour le second tour, ça ne revient pas à faire fuir votre électorat ?
« Ce serait irréaliste de penser que nous gagnerions seul et ne pas faire une union à gauche mais on en est pas là encore (ndlr : en pensant à un report vers le candidat socialiste par exemple), nous avons, nous, toutes nos chances ».

Vous militez pour un redécoupage du canton unique de Sainte-Marie…
« J’ai fait le souhait à plusieurs reprises que Sainte-Marie soit découpée en trois cantons car nous frôlons les 22 000 inscrits, c’est énorme, c’est le plus gros canton de l’île. Le fait que la municipalité n’ait pas appuyé ce redécoupage n’est pas un signal démocratique fort d’une part. D’autre part, un canton aussi important c’est aussi affaiblir la voix de Sainte-Marie au sein de l’assemblée départementale ».

Quel bilan tirez-vous de vos deux mandatures au Conseil général ?
« Evoquer une candidature c’est aussi évoquer un bilan que j’ai pu faire au cours de mes deux mandatures en effet. En 91, j’ai fait inscrire le troisième collège sur le canton alors que les deux autres commençaient à saturer. Un projet qui avait été supprimé par mon successeur Jean-Louis Lagourgue mais que j’ai fait remettre à l’ordre du jour lors de mon second mandat au Département. Le résultat, c’est le collège de Bois-Rouge et dans la foulée un quatrième collège qui sortira l’année prochaine, en centre-ville « malheureusement » car c’est déjà très concentré. Il y a un lycée, un collège, deux établissements privés. L’idéal aurait été de le faire sortir de terre dans la zone Est, vers la Ravine des chèvres par exemple. En plus, on a proposé des terrains inondables, donc il a fallu surélever le socle du collège et ça ça a coûté une fortune. Avec ces fonds, la mairie aurait bénéficié d’infrastructures sportives importantes à la place. C’est dommage car en le faisant à la Ravine des chèvres, la municipalité aurait bénéficié d’infrastructures autour ».

Quels sont les reproches que vous faites au sortant qui est à la fois le maire de la commune ? Vous pourriez être tenté de confondre les deux tableaux.
« Comme nous sommes une commune qui jouxte le chef-lieu, il y a beaucoup d’activités de la capitale qui sont transférées sur Sainte-Marie. Il est dommage que des métiers qui concernent l’agriculture, la pêche n’aient pas été assez soutenus. Et là, le rôle du maire qui est également conseiller général n’est pas allé jusqu’au bout pour soutenir l’implantation de jeunes agriculteurs dans les hauts de Sainte-Marie qui se déserte peu à peu. Même la pêche, où Sainte-Marie était traditionnellement une ville de pêcheurs connaît un désintérêt. Elle n’est pas assez soutenue alors qu’il y a des subventions qui, entre autres, existent au niveau du Conseil général.
Au niveau de la santé, Il n’y a pas de politique dynamique. Les réseaux de prévention sont désorganisés. Il n’y a pas de coordination entre les médecins de ville, les médecins scolaires et les familles par exemple ». La santé et le social sont pourtant les priorités d’un conseiller général.

 

Quelles sont les actions que vous revendiquez lorsque vous étiez au conseil général ?
« J’ai pu mettre en place au Conseil général le frottis gratuit pour toutes les femmes et ce deux ans avant que l’Etat ne prenne en charge la gratuité.
Autre chose, quand je suis arrivé au CHD, il y avait un conflit frontal entre le Nord et le Sud (groupement hospitalier Sud Réunion). Mais c’était une compétition malsaine. J’ai discuté à l’époque avec André Thien-Ah-Koon, je lui ai dit : « Arrêtons les frais, allons vers une politique de coopération où il y aura le souci de donner sa place à chacun. On est finalement arrivé à un non chevauchement des compétences des deux. Les deux pôles ont leurs compétences respectives depuis ».
Mais ce que j’ai pu réaliser lors de mon deuxième mandat c’est grâce à l’esprit d’ouverture de Jean-Luc Poudroux. Un président démocrate et respectueux. Il a toujours respecté nos engagements, même si nous n’étions pas du même côté.

Avez-vous des reproches à vous faire dans la perte de Sainte-Marie ? Je parle tant sur le plan municipal que départemental.

« Lorsque l’on a un mandat aussi passionnant, avec des responsabilités aussi importantes, on est vraiment absorbé par ce que l’on fait. On perd le contact avec sa base. Je suis médecin et je n’avais plus le temps d’exercer ma profession, du coup mes patients étaient mécontents, La population qui essaie de me joindre à des difficulté à me trouver parce que je suis ailleurs. Vous savez à la Réunion, on ne fait pas de distinction entre un élu régional, départemental ou municipal. Il faut que l’élu, surtout s’il s’est présenté au scrutin sous son propre nom, c’est lui que l’administré sollicite. Il ne veut pas entendre parler de directeur de cabinet ou autres.
J’ai également pêché sur la communication de mes actions. Certes quand on est élu départemental on agit sur le CHD que j’évoquais précédemment par exemple, mais le CHD, pour un habitant du canton c’est loin. Lui ce qu’il veut, ce sont des actions concrètes dans son quotidien de Saint-Marien, pas ailleurs ».

Jean-Louis Lagourgue présentera-t-il quelqu’un d’autre ?

« …. (hésitations) C’est possible qu’il revienne hein… »

Sous le coup du cumul des mandats, il lâcherait quel portefeuille selon vous ?

« ….la municipalité, il laisserait la place à son fils, mais là je lui donne des idées (rires) »

Comment voyez-vous la campagne ?
« Nous essayons de tenir un niveau de discours et de contenu de discours dans nos campagnes. On se dit que c’est une époque révolue où les uns insultaient les autres, attisaient les haines, divisaient les familles au moment des campagnes électorales, allant même jusqu’à la violence avec les nervis qu’on embauchait, les affiches sauvages que l’on collait partout. A l’UPR (ou plutôt le MPG à l’époque), nous étions le premier mouvement à avoir demandé à ce que les campagnes électorales soient propres et non belliqueuses. C’est d’ailleurs ce que je vais proposer aux différents partis engagés dans la campagne. Nous nous engagerons pour un « protocole de comportement démocratique et responsable ».

L’Union Progressiste réunionnaise plutôt que le PS. Vous vous privez d’une logistique et d’un apport financier…
« Oui mais on n’a jamais voulu être assujetti à Paris dans nos prises de décisions locales. Nous étions toujours attachés au fait de prendre nos orientations par nous-mêmes et de n’être soumis à aucune tutelle. Ça ça été notre démarche fondamentale à la création de notre mouvement en 1982, l’UPR ».

Une entente cordiale avec le PS local toutefois émaillée d’un accroc d’importance…

« On a toujours été à gauche mais il y a eu un hic. Mais c’était une situation embarrassante, personne chez nous ne l’a vécue avec joie. On a toujours été alliés au PS en première intention et en deuxième avec le PC.
Mais en 98, il y avait les régionales puis les cantonales. Pour les cantonales, à cette époque, nous attendions que le PS nous interpelle comme cela se fait habituellement. Et puis, novembre, décembre, il n’y a toujours pas d’appel, les bruits circulent comme quoi le PS va faire alliance avec la droite et notamment Jean-Louis Lagourgue. Je rencontre Gilbert Annette chez moi un après-midi et il me dit : « Avec ce grand rassemblement, nous aurons une majorité pour 40 ans ». Je lui dis qu’il renie les sympathisants de notre propre camp, et là il nous répond : « Dans la vie, il faut savoir sacrifier ses amis », et là ça était un choc terrible. Et puis je me reprends, je lui dit : « Nous ne sommes pas des amis en politique, nous sommes un mouvement indépendant, nous sommes des alliés. Tu sacrifies chez toi finalement et pas chez tes amis. Tes quarante ans c’est pas gagné, ne rêve pas » lui-ai je dit avant de nous quitter. En tout cas, nos sympathisants ne voulaient plus d’alliance avec le PS car eux, ils avaient créé les conditions d’une alliance avec la droite. Malgré tout, pendant deux jours, ils ont essayé de rattraper le coup en envoyant tout le monde à notre porte, Tamaya, Fruteau, etc… Bref, ils ont envoyé les autres, pas Annette. Nous on a dit : « Désolés, on ne traite plus avec vous ». Les choses sont revenues à la normale depuis ».

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Résultat premier et unique tour des cantonales 2004 :
Jean-Louis Lagourgue (DVD) : élu avec 56,76%
Axel Kichenin (DVG) : 19,58%
Jean-François Gopal (soc) : 13,43%

Axel Kichenin :
De 85 à 92 : 2ème Vice-président du conseil général, président de la commission des affaires scolaires
De 98 à 2004 : conseiller général, délégation santé et social, puis culture et coopération régionale. Pendant ces 6 années, il préside le conseil d’administration du CHD de Bellepierre.

 

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