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Alcool: Des réunions de travail pour lutter contre la consommation excessive

Dans une "Lettre de l'Etat", le Préfet de la Réunion dresse un bilan d'étape du travail mené en concertation avec partenaires, institutionnels et associatifs sur la consommation excessive d'alcool. Voici les éléments:

Ecrit par zinfos974 – le vendredi 25 avril 2014 à 07H44

A La Réunion comme ailleurs, la consommation excessive ou trop régulière d’alcool peut avoir des conséquences dramatiques. Dans notre département, elle est la cause de 250 décès par an, d’accidents de la route, de violences ou de situations d’exclusion.

Pour lutter contre ce phénomène, le préfet a engagé une démarche, sans tabou, visant à construire une politique équilibrée, entre prévention, réglementation et contrôle. Ce projet est piloté conjointement par le directeur de cabinet et le sous-préfet chargé de la cohésion sociale et de la jeunesse, référent pour la MILDT.

Cette Lettre de l’État à La Réunion dresse un bilan d’étape d’un travail qu’il faudra poursuivre en lien avec tous les partenaires, institutionnels et associatifs.

 

Loïc Obled, Pourquoi s’intéresser à l’alcool?
Il faut regarder les choses en face. La consommation excessive
est à l’origine de situations dramatiques : isolement et marginalisation, déclenchement ou aggravation de violences au sein de la famille, plus de 20 morts sur la route chaque année, montée du diabète, etc.

Est-ce un sujet spécifique à La Réunion ?
Il est loin de ne se poser qu’à La Réunion mais il prend ici une forme particulière, du fait du type de consommation et des indicateurs socio-économiques dégradés. Il faut prendre garde à éviter toute stigmatisation. Mais c’est aussi en prenant le problème à bras le corps que l’on espère couper l’herbe sous le pied à ceux qui voudraient faire des raccourcis trop rapides.

En quoi consiste la démarche ?
Elle se veut globale. Beaucoup de choses ont été faites et beaucoup d’acteurs se sont impliqués sur ce dossier. Il faut maintenant une mise en cohérence de toutes les initiatives, pour tous œuvrer dans le même sens. La révision de l’arrêté de 2006 a été une opportunité. Pour changer ce texte, nous avons mis beaucoup d’acteurs autour de la table. Il faudrait maintenant réussir à pérenniser cette démarche car ce texte n’est qu’une étape.

C’est-à-dire ?
La première phase a été celle du diagnostic, avec des groupes de travail. La prochaine devra être celle d’une approche stratégique au niveau départemental. Nous envisageons, avec les différents partenaires, de mettre sur pied une instance qui se réunirait tous les ans pour faire un bilan et définir les grands axes de travail ainsi que la stratégie de communication. Pour ce faire, il faudra associer tous les acteurs, au premier rang desquels les maires. C’est la raison pour laquelle nous envisageons de programmer le premier rendez-vous annuel au second semestre 2014. Je tiens à remercier tous les participants aux groupes de travail. S’ils ont parfois été passionnés, ils ont toujours été constructifs et respectueux. Je remercie en particulier l’association SAOME pour son aide dans cette démarche.

 

Roselyne Coppens, pourquoi un groupe de travail « Alcool et santé » ?
Une réflexion sur la stratégie de prévention et de lutte contre l’alcoolisme implique nécessairement un questionnement sur les interactions entre consommation d’alcool et santé. Cette démarche s’inscrit en complémentarité du Projet de santé Réunion-Mayotte piloté par l’Agence de Santé Océan Indien.

Quel était l’objectif de ce groupe ?
Ce groupe partenarial avait comme objectif de dégager des pistes d’intervention visant à prévenir et réduire les méfaits sur la santé de la consommation abusive d’alcool. Il fallait tenir compte de la difficulté de faire évoluer les représentations sur le produit « alcool », souvent associé à la notion de plaisir et considéré comme moins dangereux ou grave que les produits illicites, ainsi que la nécessité d’agir auprès des populations les plus vulnérables, plus particulièrement les jeunes.

Quelles recommandations et pistes d’action ont été formulées ?
En tout premier lieu, cela concerne l’accessibilité du produit. Il a été proposé de réduire l’attractivité en faisant respecter de la réglementation en matière de vente et de publicité pour les boissons alcoolisées, de mieux contrôler la délivrance des licences de débit de boissons alcoolisées et de réduire les possibilités de parrainage d’évènements par les distributeurs de boissons alcoolisées.

Nous proposons également de mettre en œuvre une stratégie globale de prévention en faveur de la population et des personnes à risque et/ou vulnérables, afin de faire évoluer les représentations sur le produit alcool et sur les personnes alcoolo-dépendantes, de lutter contre la banalisation de l’usage et d’inciter à une consommation responsable de l’alcool. Il s’agit d’adapter le message selon les profils des consommateurs, d’intégrer la question des interactions entre consommation de boissons énergisantes et consommation excessive d’alcool ou encore de développer des actions d’actions de prévention en milieu professionnel.

Sur le plan social, il faut améliorer le repérage et le dépistage des troubles liés à l’alcool et faciliter l’accompagnement vers une prise en charge adaptée. Pour cela, nous pouvons généraliser un repérage précoce et des interventions brèves auprès des professionnels, développer des consultations pour les jeunes, informer sur les structures et dispositifs d’aide et de soins, soutenir les aidants et l’entourage, améliorer la prise en charge sanitaire et sociale des auteurs d’infractions liées à l’alcool et enfin développer des mesures d’accompagnement social personnalisé pour les usagers en grande précarité.

Nous devons développer une culture commune en addictologie. Nous pouvons accompagner la formation des professionnels de la vente à la réglementation, aux risques liés à la consommation excessive d’alcool et à la gestion des refus de servir. Il pourrait y avoir par exemple des stages de formation obligatoires pour les professionnels de la vente qui contreviennent à la réglementation mais également pour ceux qui interviennent dans les domaines de la prévention, de l’animation, de la répression et de la prise en charge (sanitaire, sociale, judiciaire) sur la réglementation, les représentations, les risques liés à la consommation excessive d’alcool, les dispositifs de prise en charge et le repérage précoce et les interventions brèves.

 

Hélène Rouland Boyer, comment s’est organisé le groupe de travail ?
Le groupe de travail relatif à la sécurité routière a conduit ses travaux dans la continuité des réflexions engagées lors de l’élaboration du document général d’objectif fin 2013. Ce document définit en effet les enjeux prioritaires pour La Réunion en matière de sécurité routière et la lutte contre l’alcool au volant est bien entendu un de nos premiers objectifs puisque sur les 5 dernières années, l’alcool a été responsable de plus de la moitié des tués sur nos routes.

L’Unité de Sécurité Routière, en lien avec RéuniSaf, organisme de formation continue à l’attention des professionnels à la recherche de perfectionnement dans les problématiques d’alcoolisation au féminin, a donc sollicité nos partenaires que sont les chargés de mission sécurité routière, les forces de l’ordre, la prévention routière, mais aussi les représentants de l’ Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH) et du syndicat régional des exploitants de stations services. Il faut souligner que l’implication et la mobilisation de l’ensemble des acteurs et partenaires de la sécurité routière sur cette thématique étaient déjà très importantes avant la réflexion d’ensemble menée par la préfecture. Grâce à l’observatoire départemental de la sécurité routière, nous disposons d’outils statistiques qui nous permettent de suivre précisément l’évolution du facteur « alcool » sur l’accidentalité routière depuis plus de 10 ans.

Dans ce contexte, quelles sont les préconisations de votre groupe de travail ?
Sans entrer dans le détail de ce qui a pu être proposé, il a paru important à l’ensemble des participants de pouvoir continuer à développer la culture « sécurité
routière » auprès de certains milieux jusqu’à présent moins présents sur cette thématique (milieu associatif n’ayant pas pour objectif exclusif la prévention, tel que le domaine sportif, culturel ou encore les associations estudiantines, le monde de l’entreprise, les mutuelles de santé…). De même, il a été proposé de prendre en compte l’ensemble des lieux de consommation d’alcool comme vecteur de communication pour la sécurité routière et de tenter d’impliquer toutes les catégories d’organisateurs de soirée dans la lutte contre l’alcool au volant.

Il a également été question de renforcer le partenariat avec les communes au travers du réseau des élus référents sécurité routière. Enfin, la question du renforcement de la communication locale a paru tout à fait prépondérante à l’ensemble des partenaires du groupe de travail. Nous devons chercher à établir des partenariats avec des acteurs économiques qui pourront nous aider à réaliser des actions qui marqueront peu à peu les consciences et qui pourront également conforter l’image positive de toux ceux qui nous aideront. Certaines catégories d’usagers de la route et notamment les piétons (la moitié des tués sur la route en 2012 dont la moitié était alcoolisée) sont moins réceptives aux messages délivrés jusqu’à présent.

Malgré ces difficultés, il est bien entendu évident que nous restons tous extrêmement mobilisés pour faire changer les comportements et permettre une diminution des accidents sur nos routes.

 

Jean-Marc Villard, pourquoi a-t-il été nécessaire de faire un nouvel arrêté?
Le dispositif législatif national a changé et il était devenu nécessaire de faire évoluer la réglementation locale en vigueur fixée par un arrêté de 2006. Ainsi, la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires a modifié le code de santé publique. Il y est inscrit l’obligation de formation pour toute vente d’alcool entre 22h et 8h et de publicité sur l’étalage des boissons non alcoolisées, l’interdiction de la vente aux mineurs de boissons alcoolisées, l’interdiction de principe des « open bar » (vente à volonté contre somme forfaitaire), ainsi que l’augmentation des
pouvoirs de police des maires sur la restriction de la vente d’alcool à emporter (notamment l’interdiction dans les points de vente de carburant de boissons réfrigérées ou d’alcool à emporter entre 18h et 8h).

Le code du Tourisme a lui aussi été modifié. Cela concerne les conditions et horaires d’ouverture des discothèques, assorti de l’obligation de s’équiper d’appareils de dépistage de l’imprégnation alcoolique. Enfin, diverses mesures touchant l’ordre public ont été prises ces dernières années telles que l’encadrement des évènements festifs organisés par les réseaux sociaux de type apéritifs géants ou rassemblements, les promotions « happy hours », l’interdiction de fumer dans les débits de boisson, etc.

Puisqu’il s’agit d’une réglementation nationale, pourquoi le préfet doit il prendre un arrêté ?
Eu égard aux nécessités locales et dans le respect des dispositions des articles L.2212-2 et 2215-1 du code général des collectivités territoriales, l’autorité préfectorale est amenée à prendre des mesures spécifiques à l’échelle du département. C’est le cas pour les heures d’ouverture et de fermeture des débits de boissons, les ouvertures de droit, ou plutôt les fermetures, qui peuvent varier d’un département à l’autre du point de vue des dates mais aussi des horaires.

Ainsi à La Réunion nous passons d’un régime de 3 à 5 dérogations pour une fermeture à 2 heures du matin qui inclut désormais la fête de l’abolition de l’esclavage du 20 décembre ou encore la fête de la musique. Dans le cas de l’ouverture d’un débit de boisson en tant que discothèque, il n’existe pas de reconnaissance administrative particulière. Plusieurs réglementations doivent cependant être respectées. Elles sont répertoriées dans le nouvel
arrêté et désormais codifiée.

Il s’agissait pour nous de reprendre un arrêté devenu obsolète et désuet par un ensemble de mesures dont le but est d’assurer le respect des lois de la République et dans une perspective majeure de réduction les accidents de la route dont nous savons que la consommation excessive de l’alcool est le premier facteur. Cette réforme doit cependant respecter le principe de la liberté du commerce et de l’industrie et cadrer au plus près avec la réalité socio-économique du département.

Quelle a été votre démarche ?
Chaque préfet de département est tenu de prendre un arrêté relatif à la police des débits de boissons dont l’objet essentiel est de réglementer les horaires d’ouverture mais aussi de préciser le régime des dérogations horaires, la fixation des périmètres protégés ou encore la mise en place de prescriptions liées à l’ordre public.

Même si aucune disposition législative ou réglementaire ne n’impose une consultation préalable, il est de tradition que le préfet s’entoure d’avis consultatifs. Ainsi, et en élargissant très sensiblement les contacts préexistants à l’origine des arrêtés antérieurs, une large consultation a cette fois été opérée pour associer tous les acteurs de la vie sociale et économique. Ainsi, des services de l’Etat, les chambres consulaires, les organisations syndicales représentatives, diverses associations et services de santé ont été associés à cette démarche. Ces groupes de travail ont travaillé de concert pendant plusieurs mois pour tenir compte des aspirations légitimes de chacun.

 

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