La canne réunionnaise produite plus pour alimenter les centrales thermiques que pour son sucre d’ici quelques années ? L’éventualité de la création d’une canne plus fibreuse et moins riche en sucre donne un aperçu du futur dilemme. La question divise les planteurs.
Au sein de la Chambre d’agriculture des discussions sont en cours, confie Clarel Coindin Virama. Le vice-président assure que le système « canne sucre » est tout de même plébiscité par la majorité des planteurs. « Ce sont les sucres spéciaux qui font la richesse de La Réunion », rappelle-t-il.
Du côté de la FDSEA, on prévient que « si un changement de cap devait se mettre en place, la bagasse devra faire l’objet d’une meilleure prise en compte » affirme Frédéric Vienne, le président de la fédération agricole.
Une canne plus bagasse que sucre pour une transition en douceur vers la fin des quotas?
La question de la revalorisation de la prime bagasse semble être au coeur du débat. En octobre dernier, elle passait de 13 à 14,50 euros/tonne de canne à sucre. Une augmentation insuffisante aux yeux des planteurs.
Pour autant, le président du syndicat n’écarte pas l’idée d’une canne plus fibreuse. « Cela permettrait de continuer à faire de la canne malgré la fin des quotas sucriers annoncés pour 2017 ». La valorisation de la bagasse apparaît alors comme une porte qui s’ouvre alors qu’une autre menace de se fermer. « Il nous faut envisager davantage les différentes potentialités que nous offre la canne à sucre à La Réunion », ajoute-t-il.
Pour Bernard Siegmund, directeur d’Ercane, le centre de recherche sur la productivité sucrière et les nouvelles valorisations de la canne à sucre, les agriculteurs n’ont pas d’inquiétudes à avoir. La fibre n’est qu’un élément complémentaire recherché lors des créations. « L’objectif est d’assoir une partie plus importante des variétés qui maximisent la production de sucre et de fibre à l’hectare, pour fournir à la fois les sucreries et les centrales thermiques », rassure-t-il.
« Il n’y a pas eu de directive » officielle pour maximiser la fibre au détriment du sucre
Aucune directive de l’interprofession n’a été donnée selon lui pour créer des variétés plus fibreuses au détriment de la production du sucre. Et la future variété 2016 qui sortira de ses laboratoires devrait continuer à répondre aux évidences des planteurs tout en respectant « cette évolution présente à La Réunion et dans le monde », celle d’un développement des énergies vertes.
Les deux centrales thermiques du Gol et de Bois Rouge produisent déjà depuis plus de 20 ans en combiné charbon/canne de l’électricité grâce à l’utilisation de la bagasse. En 2013, la bagasse couvrait 19% de la production d’énergie. D’ici 2023, elle devrait atteindre les 60% selon Albioma, premier producteur d’électricité de l’île.